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Bande dessinéeet Policier - Thriller  

Galata (tome 1) - Le poète assassiné
de Fred Le Berre , Alain Paris et Stefano Palumbo
Les Humanoïdes associés - Dédales 2005 /  10.40 €- 68.12  ffr. / 48 pages
ISBN : 2731616946
FORMAT : 23 x 30 cm

Meurtre au-delà de la sublime porte

A l’heure où la question de l’entrée de la Turquie dans l’Europe (et son « identité » européenne ou orientale) déchaîne les passions, il y a une habileté opportune à publier le récit d’une enquête menée par un Vénitien dans Galata, le quartier chrétien d’Istanbul. Saluons donc cette entreprise qui, tout en offrant aux fans de polars historiques et exotiques un cadre mythique – la Sublime porte et l’empire ottoman dans une période encore faste – amène à reconsidérer l’histoire de cette ville frontière, indiscutablement orientale et pourtant si attirante et stimulante pour la culture occidentale.

Nous sommes au XVIe siècle : Ogier de Mercoeur arrive à Istanbul, chargé par le doge de Venise, qui l’a nommé prévôt, de veiller sur le quartier et la communauté chrétienne. Mais la mission commence mal : il n’a pas encore débarqué qu’il échappe déjà à une tentative d’assassinat, et c’est un poète français un peu collant qui fait les frais de l’affaire. Il n’en faut pas plus pour lancer le bouillant chevalier dans les ruelles de la capitale ottomane sur la piste d’assassins valaques (on dirait des Roumains aujourd’hui) jusqu’à un mystérieux commanditaire qui n’est autre que le fils du doge… autant dire que les ennuis commencent. En outre, la troupe mise à la disposition de Mercoeur n’est pas des plus disciplinée (pour ne pas dire qu’elle est composée de truands et d’aigrefins). Et pour couronner le tout, le nouveau prévôt doit s’encombrer d’un jeune étudiant, neveu de l’ambassadeur vénitien, Antonio Garofalo, qui se dit disciple de Léonard de Vinci (il a quand même réussi à bricoler un pistolet à trois coups !). La vie du sire de Mercoeur ne sera pas des plus faciles au cœur de l’Orient compliqué.

De l’action, des inventions bizarres (Léonard de Vinci est assez porteur en ce moment !), de l’exotisme, des méchants bizarres venus de contrées lointaines, des traîtres, des loukoums… tout cela forme un cocktail efficace pour un album très agréable, plus « aventure » que « polar », dans la lignée du Scorpion de Marini (le graphisme s’en rapproche d’ailleurs). Quant à Ogier, voilà un vrai héros, au caractère pas commode, à la fois rusé et passionné, plus prompt à jouer de la rapière que des belles manières. Le scénario concocté par Alain Paris et Fred le Berre est aussi enjoué qu’un Belmondo de la grande époque : enquête et bagarres alternent et le lecteur est constamment entraîné dans un rythme d’enfer par Ogier, à travers les ruelles stambouliotes, jusqu’au palais du sultan lui-même. Le graphisme est, à l’aune de l’intrigue, assez réussi, si ce n’est la fascination de Stefano Palumbo pour les torses surdimensionnés, genre Action Man. L’ensemble est servi par un beau travail des coloristes, qui fait parfois quasiment ressortir l’image de l’album. Voilà un essai bien transformé, à suivre.

Gilles Ferragu
( Mis en ligne le 30/07/2005 )
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