L'actualité du livre
Bande dessinéeet Les grands classiques  

Astérix (tome 33) - Le ciel lui tombe sur la tête
de Albert Uderzo
Editions Albert René 2005 /  8.90 €- 58.3  ffr. / 48 pages
ISBN : 2864971704
FORMAT : 23 x 30 cm

L'auteur de l'article : Agnès Abécassis est journaliste. Elle est l’auteur d’une comédie intitulée Les Tribulations d'une Jeune Divorcée, aux éditions Fleuve Noir (www.agnesabecassis.com).


Au secours ! Les extraterrestres ont enlevé le scénario !

Entendons-nous bien. On n’a pas envie de lui faire de la peine, à Uderzo. C’est un immense dessinateur, il a enchanté nos jeunes années par ses personnages au graphisme irréprochable, c’est un très grand homme de la bande dessinée… alors pourquoi veut-il, lui, nous faire de la peine à nous ? A quoi rime exactement cet album ?

Certes, on l’a dit et répété (à juste titre) : depuis la mort de René Goscinny, scénariste génial du petit blond avec des sourcils noirs, Astérix s’est retrouvé amputé d’une partie de lui-même. Alors bien sûr, on peut survivre à une amputation, mais on n’est pas très joli après, on claudique, on fait comme on peut, mais ce n’est plus comme avant. On a beaucoup reproché à Albert Uderzo de ne pas avoir continué de faire vivre son village gaulois en s’associant à un scénariste dont c’était le métier. Après tout, il y a ceux qui savent raconter les blagues, et ceux qui savent les écrire : l’inversion des rôles menant généralement à la catastrophe. Pourtant il a choisi de s’essayer lui-même à l’écriture, en mémoire de la complicité qu’il partageait avec le co-créateur de son personnage, obtenant le résultat que l’on sait : les albums sans Goscinny sont tous très inégaux. Mais ce dernier opus va au-delà de tout ce que l’on pouvait imaginer.

Résumons le scénario (ou plutôt son absence) : dans le village gaulois, les habitants sont immobiles, pétrifiés par une mystérieuse boule flottant au dessus de leur tête. Seuls Astérix, Obélix, Idéfix et Panoramix, qui ont bu de la potion magique, sont immunisés. A partir de là, il y a une histoire d’extraterrestres de deux types : les « Tadsylwine » (anagramme imprononçable de « Walt Disney »), dont le chef ressemble à un Mickey à petites oreilles, accompagné de dizaines de clones de Superman ayant les traits d’Arnold Schwarzenegger (si…). Et puis il y a les « Nagmas » (anagramme de « mangas »), dont le chef aux yeux bridés « Gueuldera » (mélange entre une insulte et Goldorak… nos amis asiatiques apprécieront…) porte une armure ressemblant à une carapace de cafard. Les deux clans sont venus pour emporter la potion magique sur leur planète, et exigent qu’on la leur remette. Voilà, débrouillez-vous avec ça.

L’équipe d’Albert Uderzo, elle, se débrouille très bien avec, puisqu’une immense campagne de promotion a été mise en place pour la sortie du 33e tome, avec un tirage de 8 millions d’exemplaires pour une sortie simultanée dans 27 pays. Le problème, c’est que tout est faux dans cette histoire, il n’y a plus aucun code, les tabous volent en éclat (depuis déjà plusieurs albums, remarquez…), on ne reconnaît plus rien, ce n’est plus une machine à rêve, amusante et spirituelle, c’est une machine à fric, froide et désincarnée. Et cette trahison donne envie de pleurer. Encore une part d’enfance qui s’éloigne…

Impossible d’imaginer que personne, dans l’entourage du génial dessinateur, ne l’ait prévenu de la stupéfiante invraisemblance du scénario. Alors que s’est-il passé ? Le petit Gaulois que nous aimions tant a sans doute fait une overdose fatale de potion magique…

Agnès Abécassis
( Mis en ligne le 22/10/2005 )
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