L'actualité du livre
Bande dessinéeet Adaptation  

Tintagel (tome 1) - Yseut la blonde
de Rodolphe et François Allot
Delcourt - Terres de légendes 2012 /  13.95 €- 91.37  ffr. / 48 pages
ISBN : 978-2-7560-2091-4
FORMAT : 23x32 cm

Classiquement classique

L’histoire de Tristan et Yseut est un drame classique, issu de la tradition orale celtique avant d’entrer, au XIIe siècle, dans le patrimoine littéraire. Tristan est le fils du roi de Loonois, Rivalen, et de la reine Blanchefleur… Un fils bientôt orphelin lorsque le roi Rivalen meurt à la guerre, et que la reine en meurt de tristesse. Élevé par un vassal de Rivalen, l’enfant ignore tout de ses origines, mais à la suite d’un enlèvement par des pirates, le voilà à la cour de Cornouailles où sa prestance et son talent de chanteur séduisent le roi Marc… qui ne découvre que tardivement qu’il a face à lui son neveu. Tristan est, entre-temps, devenu un chevalier accompli, qui parvient même à vaincre, lors d’un combat à mort, le Morholt, immense guerrier irlandais. Rien ne semble pouvoir s’opposer à l’ascension du jeune chevalier. Mais l’amour, le divin et terrible amour, s’immisce. Chargé d’aller quérir une épouse pour son roi, Tristan, après quelques péripéties, en tombe définitivement amoureux – un filtre qui traînait par là – et se trouve partagé désormais entre son devoir de chevalier, de vassal, de neveu et ses sentiments…

Le conte de Tristan et d’Yseut est un beau drame, intemporel – l’histoire d’amour entre une reine et un chevalier partagé entre ses devoirs et ses émotions – qui rappelle l’histoire de Lancelot et Guenièvre. Bien qu’il n’appartienne pas au cycle arthurien, le récit s’en rapproche. C’est du reste l’ambiance choisie par le scénariste, Rodolphe, qui a également opté pour une narration très classique, à la troisième personne. L’histoire nous est contée comme par un troubadour, dans un style orné, et dans une langue recherchée, sur le modèle de la littérature de cours. Ce parti pris donne à la narration un charme un peu ancien et désuet, très agréable... pour qui accepte de se prêter au jeu (la modernité, il n’y a pas que ça de vrai). Agréable également est le graphisme de François Allot, magnifié par le travail de couleurs de Lerolle, sur un mode tout autant classique : les ambiances, les architectures – châteaux forts et donjons imprenables – les armures et les vêtements de cour… tout est minutieusement détaillé et mis en valeur, dans une transposition sage, qui ne s’autorise que quelques effets (vignettes posées sur des grands paysages). Les morceaux de bravoure (le combat avec le Morholt, le dragon) sont traités avec fougue, mais sans fantaisie, dans un style également très classique. On est dans une adaptation sage mais fine, détaillée, qui séduira un public amateur de romans de chevalerie à l’ancienne. Si l’on doit émettre quelques critiques sur une transposition fort réussie, c’est peut-être dans les visages : c’est là l’une des faiblesses d’Allot, qui, par volonté de réalisme, ne parvient jamais à fixer véritablement le visage des héros, parfois franchement hideux… un bémol que la suite de cette adaptation réussie corrigera.

Gilles Ferragu
( Mis en ligne le 16/07/2012 )
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