L'actualité du livre
Histoire & Sciences socialeset Période Contemporaine  

Femmes dans la guerre - 1939-1945
de Claude Quétel
Larousse 2004 /  38 €- 248.9  ffr. / 240 pages
ISBN : 2-03-505436-2
FORMAT : 26x31 cm

L’auteur du compte rendu : Mathilde Larrère est maître de conférences en Histoire contemporaine à l'université Paris XIII et à l'IEP de Paris.

Muettes Minerves...

Voici un beau livre, sur ces éternelles victimes de la guerre, mais aussi éternelles oubliées des conflits : les femmes. Beau livre parce que bien illustré : des centaines de photographies en noir et blanc, originales, mises en valeur par une maquette aérée et une bonne qualité de papier et de tirage. Beau livre aussi parce que servi par un texte rigoureux, précis, mais également émouvant par la part réservée aux témoignages, aux histoires vécues.

Ces femmes en guerre, le livre de Claude Quetel les abordent toutes : la mère éplorée, celle qui lutte au quotidien pour survivre, dans les files d’attentes, sous les bombardements, sur les routes de l’exode ; la travailleuse, mobilisée pour l’effort de guerre ; l’infirmière dévouée ; la combattante de l’ombre, résistante des maquis ou affectée à la logistique ; la déportée de Ravenbrück, la survivante d’Auschwitz ; celle qui défile sur les Champs Elysées, celle que l’on tond. Française, Allemande, Anglaise, Russe, Finlandaise ; obscure ou star mobilisée pour soutenir le moral du front ou de l’arrière ; victime ou bourreau ; elles sont toutes là. Le livre, première grande synthèse sur l’histoire des femmes en guerre, leur rend hommage et justice, mais surtout nous les dévoilent, nous les fait connaître et leur donne vie.

Quelques bémols pourtant, pour qui voudrait avoir de l’ouvrage un usage plus scientifique, surtout en ces temps de programme d’agrégation sur la guerre! L’illustration, magnifique certes, est uniquement photographique : les affiches, sources pourtant passionnantes pour la compréhension de la représentation des femmes en guerre, ne sont pas reproduites (bien qu’évoquées et décrites dans le texte...). Ces photos sont, d’autre part, insuffisamment légendées (juste leur date, lieu et sujet), sans qu’aucun renseignement ne soit donné sur leur producteur, leur usage. Des illustrations donc, mais des sources muettes pour l’historien.

L’ouvrage est construit de façon surprenante. Chaque chapitre débute par un texte assez long, nourri, illustré par des photos réduites, puis comprend une série de doubles pages thématiques, dominées par des reproductions de grand format (dont une en pleine page) et commentées par un texte court. Or, ces doubles pages reprennent, non sans une certaine redondance, tout ce qui a déjà été dit dans le texte introductif. Comme si l’on pensait qu’un lecteur fatigué allait se contenter de ces pages illustrées, laissant à un autre lecteur, plus érudit, le soin de lire le propos plus sérieux! Mais pour ce lecteur, les pages thématiques n’ont plus guère d’intérêt!

D’autre part, le texte reste assez factuel, événementiel, parfois anecdotique, constituant une véritable mine de renseignements, très incarné, et pour cela très émouvant, mais insuffisamment problématisé. Les cas nationaux sont évoqués, à la suite les uns des autres, sans nourrir de réflexion comparative.

Mais ce sont là des critiques d’historienne, un peu sévères et sans doute injustes pour un ouvrage qui a surtout vocation à s’adresser à un public plus large que les seuls étudiants de concours ou de licence, ce qu’il fait alors avec succès.

Mathilde Larrère
( Mis en ligne le 07/12/2004 )
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