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Fritz Lang
de Michel Marmin
Pardes - Qui suis-je ? 2004 /  12.00 €- 78.6  ffr. / 128 pages
ISBN : 2-86714-342-X

L… le Maudit

Dans l’essai qu’il publie aux éditions Pardès sur le génial et mythique Fritz Lang (1890-1976), Michel Marmin a tort de déclarer que la cinéphilie n’existe plus aujourd’hui : son ouvrage, bref mais très réussi, nous invite en effet à penser tout le contraire…

C’est que l’auteur connaît son affaire en 7ème art : n’a-t-il pas collaboré à la rédaction de nombreuses encyclopédies du cinéma, scénarisé deux films de Gérard Blain et retracé récemment la carrière de Raoul Walsh (chez Dualpha) ? Alors, quand il s’agit d’aborder la monde obscur, labyrinthique et obsessionnel de Maître Lang, Marmin lâche la bonde à la passion et à l’érudition…

L’ouvrage n’est pas une biographie (hommage est d’ailleurs d’emblée rendu à l’incontournable travail de Patrick McGilligan), mais bien une approche critique de l’œuvre de Fritz Lang et de ses deux versants, la période allemande et la période américaine. Plus indulgent pour la première que pour la seconde, Marmin estime en effet que, après son passage au service de la machine de production hollywoodienne, Lang s’est parfois égaré dans un freudisme sans aucun rapport avec la profondeur des caractères et la richesse symbolique de ses films d’avant 1933.

Il n’empêche que même pour les oeuvres qu’il juge les moins abouties, l’auteur poursuit une lecture amoureuse d’une filmographie riche de près de quarante titres, parmi lesquels les différentes versions du Docteur Mabuse, l’indispensable Metropolis, le toujours inquiétant M le Maudit… D’autres raretés sont révélées au profane, tel cet étonnant Une femme dans la lune, inspiré d’un roman de Thea von Harbou (l’épouse de Lang) et dont on apprend au détour d’un paragraphe que c’est dans ce film qu’apparaît pour la première fois le compte à rebours, invention par la suite reconnue à Fritz Lang par la NASA !

Au fil des pages se révèle un homme torturé, perfectionniste à l’extrême, fasciné par le pouvoir et les femmes. On comprend aisément dès lors pourquoi Michel Marmin recourt plus d’une fois à Balzac (en tout cas celui d’Une ténébreuse affaire et de L’Histoire des Treize) pour nous donner à comprendre les ambiguïtés idéologiques et effleurer les mystères de l’alchimie créatrice de celui à qui Godard rendra un bel hommage dans Le Mépris en 1963.

Voici donc un ouvrage parfaitement documenté et gaillardement troussé sur l’univers d’un créateur génial, dont l’obscurité est ici et là trouée par quelques éclairs de sensualité féminine et les clins d’œil complices d’un amateur certes circonspect, mais toujours déférent…

Frédéric Saenen
( Mis en ligne le 04/02/2005 )
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