| Lili Castille Bar à frissons Editions du Cygne 2012 / 13 € - 85.15 ffr. / 114 pages ISBN : 978-2-84924-297-1 FORMAT : 13 x 20 cm Imprimer
Lili Castille, la blogueuse ligure que connaissent tous les Parisiens aficionados de ''fashion'', dérotisme et derrances-féminines-toujours-très-classes, vient de publier un recueil de nouvelles (sept très exactement, un chiffre sacré dans la Bible). Un livre quelle présente elle-même en quatrième de couverture comme «des histoires qui font mouche, des personnages borderline, de lembrouille littéraire, du multi-prisme, de létrange, de lhumour et du sexe», ce qui est déjà beaucoup dire, et cependant trop peu.
Avec ce livre, Lili ne sessaie pas à la fiction : elle y retourne, y replonge, comme repart à toute hâte vers la rivière le poisson trop longtemps demeuré sur la berge, et elle nous y plonge avec elle, à notre corps défendant ou consentant, dans son milieu à elle, dans son espace privé, celui où elle semble être née, ou avoir vécu depuis les débuts du monde. Elle nous y enfonce, nous y promène, nous y distrait, comme la Sirène qui voulait attirer les compagnons dUlysse dans la vieille histoire homérique, et tant pis pour celui qui na pas de branchies.
Dans le monde de Lili, il y a des jolies filles qui se poudrent gentiment le nez, les fesses à lair, lil perdu dans le miroir, des odeurs de métro, des verres de bon vin, des curs dagneau dans les frigos et des cadavres, exquis ou pas, derrière les canapés. Le rythme est là, le sens de la formule aussi, cest surprenant, cest coloré
et bien sûr ça ne se termine jamais comme on croyait le deviner.
Lili Castille a un don très particulier pour décrire les situations, les postures, les échanges de regards. Les dialogues sont vifs, et, telle Protée, lauteur endosse toutes les apparences, se glisse aussi facilement dans la peau du désir masculin que celui des femmes évidemment, dans lépoque actuelle ou il y a cinquante ans, dans le monde des vivants ou celui des fantômes. Tout lui est un, comme eût dit Montaigne, tout va à son écriture comme les rivières au fleuve. Elle joue avec le quotidien, elle recouvre de détails onctueux et dambiances feutrées les lames des couteaux et les dents des vampires, puis les dénude brutalement. Elle mélange dans son mixeur rêves et cauchemars, oreillers et linceuls, voluptés et angoisses. Ça tourne sans cesse, à la bonne cadence, ça vous entraîne, ça ne vous lâche pas.
Un joli petit art du bain moussant et de la douche froide, à déconseiller aux âmes sensibles
Christophe Colera ( Mis en ligne le 23/11/2012 ) Imprimer | | |