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Littérature -> Romans & Nouvelles |
| Denis Jeambar Dark nights - Nouvelles nocturnes Calmann-Lévy 2014 / 17 € - 111.35 ffr. / 234 pages ISBN : 978-2-7021-5395-6 FORMAT : 14,0 cm × 21,5 cm Imprimer
Après dix-sept ans dabsence dans la fiction, Denis Jeambar, ancien directeur du Point et de LExpress, revient avec 29 nouvelles très courtes qui nous rappellent que nous ne sommes jamais à labri des coups du sort. Comme le titre lindique, dans lensemble de ces courtes histoires, la nuit réelle ou figurée est toujours présente : latmosphère de la nuit tantôt glaçante, tantôt désenchantée ne cesse de nous surprendre, avec son lot de mystères.
Dans la première nouvelle, «Le cheval dans la nuit», un riche collectionneur retiré dans un village achète après de longues tractations une toile à un peintre voisin avec qui il a sympathisé : «Cétait un triptyque de trois mètres de long sur un mètre trente de haut représentant la croupe dun puissant cheval blanc senfonçant au galop dans un horizon nocturne» (p.15). Nous reconnaissons le cheval de la couverture. En ravivant le feu dans la cheminée avant de se coucher, le propriétaire ne prend pas garde aux escarbilles et le matin suivant on ne retrouve que des cadavres calcinés... Tout a disparu dans le mystère du feu et de la nuit.
Dans «Flic Flac», les héros sappellent Paul et Virginie et leur histoire est aussi triste que celle des personnages de Bernardin de Saint Pierre.«Quelque chose qui devait sappeler la jeunesse sétait brisé en lui et il ne parvenait pas à recoller les morceaux de cette porcelaine intime» (p.123), dit Denis Jeambar en hommage à Scott Fitzgerald quil admire profondément («Dernière danse»). Dans «Tendre est la Seine», lauteur nomme d'ailleurs ses héros Scott et Zelda, avec une histoire de folie, d'ailleurs.
La nouvelle la plus poignante est sans doute «Feu à volonté», le drame dun homme qui a parfaitement réussi sa vie professionnelle mais que sa femme et ses enfants ont quitté : «Il avait beau se dire quil était devenu une star dans son métier, il avait réalisé en une seconde quil navait édifié quun château de sable» (p.93). Il part en vacances au Guatemala dans une voiture louée, il roule dans la campagne, un homme masqué le met en joue avec un fusil. Il massacre furieusement lassaillant par peur de mourir avant de sapercevoir que cétait un enfant. Lavant-dernier texte, «Déambulations criminelles», qui est aussi le plus long, développe la problématique du bien et du mal : «le jeu déchecs du Bien et du Mal commence quon le veuille ou non dès la naissance. Tout se joue à cet instant précis, le possible et linterdit (
) Je tue ou je suis tué» (p.175). Caïn se libère de ses chaînes par le crime...
Lauteur pense quon invente sa vie, on la conduit comme on veut, mais le destin vient à un moment ou à un autre nous fracasser. La quête de léternité et la certitude quelle nexiste pas, la fuite du temps, la cruauté comme la bonté, la nostalgie, le délabrement du corps ou de lâme saisissent le lecteur et linvitent à lintrospection. Les nouvelles correspondent au rythme de la vie avec des surprises dans les destins. Le libre arbitre et la part de violence sise en chacun de nous soumettent l'humanité à la nécessité d'un choix, celui de contrôler ou pas ces instincts.
Voici le recueil dun idéaliste désenchanté dont les personnages voient leur représentation du monde se déformer, et qui portent tous en eux un mystère...
Eliane Mazerm ( Mis en ligne le 28/02/2014 ) Imprimer | | |
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