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Littérature -> Romans & Nouvelles |
| Stefano Benni De toutes les richesses Actes Sud - Lettres italiennes 2014 / 22 € - 144.1 ffr. / 275 pages ISBN : 978-2-330-03207-4 FORMAT : 11,5 cm × 21,6 cm
Marguerite Pozzoli (Traducteur) Imprimer
Après avoir écrit de nombreux romans dont Margherita Dolcevita, Stefano Benni, virtuose italien du rire et de labsurde, nous revient après avoir été malade avec De toutes les richesses, roman poétique et amusant, tout en finesse et délicatesse. Il a changé, son écriture est plus profonde et nostalgique ; il est assagi mais tout aussi imaginatif.
Martin B., presque soixante dix ans, vit sa retraite de professeur duniversité dans une maison isolée sur une colline au bord dune forêt, à la lisière du village de Bourgcornu, au milieu de la chaîne des Apennins. Son fidèle compagnon est un chien, Ombra, avec qui il a de longues conversations tout comme il philosophe avec les animaux sauvages. Il écrit de la poésie pour passer le temps et sintéresse particulièrement à luvre dun poète maudit local, Domenico Rispoli, dit lenchaîné, mort mystérieusement dans un asile de fous en 1933. Le seul ami de Martin est son voisin Virgilio, «le hippy un peu flapi. Virgilio alias Voudstock habite dans une maison rutilante de tags (
) .Pour lui le temps sest arrêté à lépoque du paléo-rock et de Woodstock. Avec son bandana, il est persuadé de ressembler à Keith Richards des Rolling Stones ; moi il me rappelle une de mes arrières grands-mères que jai vue ridée et mourante, un mouchoir sur la tête».
La solitude de Martin est interrompue par larrivée dans la maison voisine dun jeune couple : Aldo, peintraillon et marchand dart, et Michelle, actrice et ballerine, une belle blonde, «la princesse des blés». Avec Aldo, le professeur se revoit jeune, ambitieux et doutant de son propre talent. Michelle lui fait penser à son grand amour de jeunesse. Cette rencontre éclaire dune lumière nouvelle et inattendue sa vie monotone. Avec le départ dAldo après une énième dispute du couple, Michelle devient la Nastenka du vieux rêveur des nuits blanches de Dostoïevski qui se prend à espérer. Ils se racontent leurs secrets, leurs désirs, leurs rêves. A la kermesse du village, ils dansent une valse endiablée sur lair du Beau Danube Bleu : «Et je vis quelle me suivait sans effort, que je dansais avec une grâce suffisante. (
) Je sentis que nous formions un couple bizarre, un vieil échalas et une jeune fille mystérieuse».
Mais si on enlève la couverture du livre, peut-on reconnaître demblée lauteur ? Il y a bien des indices comme les dialogues surréalistes avec les animaux, les personnages truculents de Voudstock et Remorus qui font penser à Stefano Benni. Mais il y a plus : la description des sentiments que suscite Michelle chez le professeur, qui ne se croyait plus capable daimer, est plus poétique et émouvante que dans les précédents romans.
Benni nous offre un récit faussement simple, une réflexion sur le temps qui passe, lâge, plein dhumour, nostalgique et polyphonique. Même sil noublie pas la satire sociale, il nous rappelle que «de toutes les richesses» que peut offrir la vie, celle dune nature merveilleusement automnale, celle de nombreux petits miracles quotidiens, lamour est sans doute la plus importante. Il fait dialoguer poésie et prose, réalité contemporaine et légendes éternelles.
Même sil est moins farfelu, Benni a gardé son style particulier décriture avec beaucoup de jeux de mots (plus facilement rendus en version originale), des néologismes et des parodies dautres styles littéraires. Un roman nostalgique et poétique qui fait du bien à lâme, avec la traduction des poèmes en italien pour les amateurs.
Eliane Mazerm ( Mis en ligne le 20/06/2014 ) Imprimer
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