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Littérature -> Romans & Nouvelles |
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Authentique artificialité | | | Fernando Vallejo La Rambla paralela Belfond 2004 / 16.80 € - 110.04 ffr. / 183 pages ISBN : 2-7144-4024-X FORMAT : 14 x 23 cm Imprimer
Roman dont la forme sapparenterait plus ou moins à celle du courant de conscience, La rambla paralela se déroule à Barcelone. Vallejo invente un narrateur, un lui-même sans identité, sans contenu, quil confronte à la personnalité flamboyante et imprécatrice dun écrivain colombien plus que vieillissant venu en Catalogne pour assister à une foire aux livres dont il est lun des invités principaux. Le vieux se fiche complètement de la nature des événements, il préfère attendre la mort en buvant des coups et en songeant à son passé. Cette proximité morbide lui fait mélanger commentaires superficiels et pensées profondes qui prennent la forme de tirades moralisatrices. En réalité, lagonie de ce personnage est une agonie tonique, gâteuse et tourbillonnante. Le vieil écrivain colombien correspond au stéréotype de lintellectuel déçu et désabusé qui met toute la puissance de son esprit pour débiner la niaiserie et la nullité de la réalité actuelle.
A-t-il tort ou raison ? Le monde court-il à sa perte ? Peu importe, lécriture de Vallejo ne peut faire autrement que de portraiturer lintérieur abîmé de ce personnage. Elle suit le courant de sa vitupération sans fin. Vallejo construit son roman de manière moderne, en mélangeant lespace et le temps, en mixant habilement dialogues et pensées, et en farcissant sa prose de catalogues colériques, conscient de lenjeu formel de ce siècle débutant. On comprend bientôt que le vieil écrivain nest quun alibi, ou plutôt une métaphore. Qui représente-t-il ? La fin de la Colombie ? La fin dune époque ? La fin du monde ?
Vallejo a lélégance de ne pas trancher.
Le roman possède malgé tout lauthenticité de son artificialité. Autrement dit, sa construction si voyante, si millimétrée trop pour suggérer avec précision la présence dun véritable esprit finit par rendre attachante la figure de lécrivain. Vallejo, en léloignant de lui par leffort de composition, finit curieusement par le rapprocher de nous. Bref, au moment de faire mourir son personnage, il parvient enfin à lui donner vie. Étrange paradoxe qui fait tout le prix de ce roman : une mécanique faisant naître un sentiment suffisant pour labolir.
Alexandre Ivol ( Mis en ligne le 21/06/2004 ) Imprimer | | |
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