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| Littérature -> Romans & Nouvelles |
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Et alors, à quoi ça sert, un colloque ? | | | Julie Wolkenstein Colloque sentimental
P.O.L 2001 / 19.85 € - 130.02 ffr. / 345 pages
ISBN : 2-86744-843-3
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Prenez un manoir anglais avec tourelle, véranda et passage secret. Dressez-le sur une presqu'île rocheuse de la côte bretonne, à environ deux cent cinquante kilomètres de Paris. Reliez ladite presqu'île au continent grâce à une jetée périodiquement submergée par la marée, montant à la vitesse d'un cheval au galop. Disposez dans ledit manoir une brochette d'universitaires, réunis en colloque autour de l'oeuvre d'une certaine Ann Hellbrown. Saupoudrez le tout d'une poignée de mystères à élucider, laissez mijoter jusqu'à obtention d'un Colloque sentimental.
"Et alors, à quoi ça sert, un colloque ?" demande la vieille dame.
Patience...
Julie Wolkenstein a une indéniable prédilection pour les romans faussement policiers, l'Angleterre et les écrivains anglo-saxons exilés. L'ombre d'Henry James et celle d'Edith Wharton planent avec légèreté au-dessus du Colloque. Tous deux eurent le goût de décrire une société collet monté, aux apparences trompeuses.
Et c'est ainsi que Julie Wolkenstein nous dresse le portrait d'une Janet Anguerillos, brillante universitaire californienne qui n'a cependant jamais dépassé le coin de sa rue ; d'une Déjanire Mulot, spécialiste de l'histoire de la grossesse et de l'accouchement pour qui devenir mère est absolument exclu ; d'un Bernard Grabant, maître de conférences enchaîné à ses parents par un cordon téléphonique ; et de quelques autres personnages, tout aussi folkloriques. Mais le Colloque sentimental est aussi le portrait sensible d'Ann Hellbrown, écrivain française d'origine anglaise qui rejoignit la Grande-Bretagne après un drame obscur, un meurtre, peut-être.
"Et alors, à quoi ça sert, un colloque ?" demande la vieille dame.
Patience...
Un possible meurtre, donc. Mais aussi l'éventualité d'un manuscrit inédit d'Ann Hellbrown dont l'existence supposée excite les convoitises de Grabant, risque de ruiner les thèses de Janet et passionne Lili, étudiante de deuxième année.
Pendant quatre jours, tout ce petit monde d'universitaires guindés, monomaniaques et rongés par l'ambition va se débattre dans une atmosphère digne des romans de déduction anglais du début du XXe siècle. La plume alerte de Julie Wolkenstein taille les pièces d'un puzzle aux formes compliquées, que le lecteur s'efforce d'emboîter tant bien que mal. Quand il croit parvenir à un semblant de résultat, l'auteur goguenard l'apostrophe sans ménagement !
"Et alors, à quoi ça sert, un colloque ?" demande la vieille dame.
Patience...
Le colloque imaginé par Julie Wolkenstein est un jeu subtil, assemblage de devinettes et chassé-croisé d'aventures amoureuses contés avec une vivacité extrême, une fantaisie parfois féroce. Mais pas seulement. Derrière la parodie et l'humour se profilent des préoccupations autrement plus graves : l'enjeu de l'écriture dans ses rapports avec le réel, le suicide littéraire, la culpabilité, la maternité, la mort et le silence blanc que recouvrent les vagues de la marée montante.
"Et alors, à quoi ça sert, un colloque ?" demande la vieille dame.
La réponse s'inscrit en filigrane dans les belles pages du Colloque sentimental de Julie Wolkenstein.
Alain Korkos
( Mis en ligne le 09/10/2001 )
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