| Michal Witkowski Lubiewo L'Olivier 2007 / 21 € - 137.55 ffr. / 347 pages ISBN : 978-2-87929-548-0 FORMAT : 14,0cm x 20,5cm
Traduction de Madeleine Nasalik. Imprimer
Lomphalos de la gay attitude balte, une plage où se croisent et sacoquinent des hommes aimant les hommes, mais de tous genres : les bears ursins et barbus, les vieilles tantes, les jeunes folles et les gays du nouveau millénaire, bodybuildés, sur-épilés, lépiderme 0 défaut
Un bord de mer estampillé homo, comme à Mykonos, au Cap dAgde, etc. Où le sable conserve quelques secrets, instants de débauche dans le giron des dunes. Lubiewo est une plage naturistes comme tant dautres, sur les bords de la Baltique, fameuse pour sa faune «particulière» et aussi, peut-être, parce que son nom possède une homo
nymie avec un autre terme, «lubieznosc» qui veut dire luxure, lubricité (p.88).
Critique littéraire, Michal Witwoski, 32 ans, livre un roman gay, chroniques dun temps long, avant et après la chute des murs, évocation nostalgique dune époque où être homo comportait ces accents décadents, ces parfums de stupre, ces zones dombres, territoires de lanormalité. « Désormais les pédés prennent du bon temps dans un bar moderne et élégant, très en vogue, qui grouille de journalistes et dintellos. Attention, là on ne parle plus de pédés, mais de gays. Solarium, musique techno, que de la foutaise. Et ni la saleté, ni lextravagance ny ont droit de cité. Place à léclate. Alors quavant
» (p.40)
On pense en effet, comme le rappelle la 4ème de couverture, à Selby Jr, mais aussi à Andrew Holleran, à Edmund White, et dautres, peintres dune époque lointaine et regrettée même si lhomosexualité y revêtait plus quaujourdhui des habits monstrueux et clownesques. Soit... Mais ce qui gêne ici, cest que le roman du jeune gay balte nest quun bis repetitas anachronique, dont la narration lasse vite : cette galerie de gay freaks, androgynes, hyperféminisés et amphigouriques souffre dun «déjà-vu» trop présent, sans jamais sortir des clichés du genre.
Certains passages émeuvent, font sourire, mais beaucoup fatiguent et précipitent la course des pages. On retiendra cette liste, apparemment non exhaustive, des espèces et sous espèces de la constellation gay : «Car il faut savoir quen plus des Elégantes (variété inoffensive et cultivée qui évolue en milieu urbain), il existe une infinité de catégories tantesques ». Et lauteur de nous les énumérer en détail, les Vioques, les Mi-Tantes, la Tante Gothique, la Dingue du Shopping (en versions Elégante ou Electroménagère), la Tante-Opérette, la Tante-Vestiaire, la Tante-Intello, la ReprésenTante en Cosmétiques, la Porte-Parole des Gays au sein des Médias (ou P.P.), proche de la MiliTante, la Tante Galeriste, la Tante Coiffeuse ou encore la Noire hyper snob et glaciale (pp.209-212)
Cette réflexion enfin, pas si originale non plus mais valant la peine dêtre signalée : «Les tantes reprennent à leur compte les comportements que les femmes ont mis au rancart au fil du processus démancipation : la passivité, le plaisir dêtre dominée, le mutisme, jambes croisées/lèvres pincées en signe de fermeture, le choix de vivre au crochet dun homme plutôt que lindépendance, lauto-humiliation, un raffinement outrancier devenu introuvable même chez les femelles les plus féminines, tout, jusquà lamour des ragots et linconstance. (
) La théorie se prolonge : pour quel motif les tantes endossent-elles avec un tel délice ces attributs archaïques ? Réponse : il sagit dattributs féminins tels que les conçoivent les hommes» (p.307).
Mais tout cela reste très superficiellement exploré : lhystérie, la libido, les excès pullulent sans signaler réellement le malaise, la honte dont ils sont pourtant les stigmates. On aurait préféré suivre un seul itinéraire plutôt que dêtre soumis à pareil brouhaha dont ne ressort, au final, quune aveuglante caricature.
Bruno Portesi ( Mis en ligne le 17/12/2007 ) Imprimer
A lire également sur parutions.com:Le Danseur de Manhattan de Andrew Holleran Last exit to Brooklyn de Hubert Selby, Jr | | |