L'actualité du livre Vendredi 29 mars 2024
  
 
     
Le Livre
Littérature  ->  
Rentrée Littéraire 2021
Romans & Nouvelles
Récits
Biographies, Mémoires & Correspondances
Essais littéraires & histoire de la littérature
Policier & suspense
Classique
Fantastique & Science-fiction
Poésie & théâtre
Poches
Littérature Américaine
Divers
Entretiens

Notre équipe
Essais & documents
Philosophie
Histoire & Sciences sociales
Beaux arts / Beaux livres
Bande dessinée
Jeunesse
Art de vivre
Poches
Sciences, écologie & Médecine
Rayon gay & lesbien
Pour vous abonner au Bulletin de Parutions.com inscrivez votre E-mail
Rechercher un auteur
A B C D E F G H I
J K L M N O P Q R
S T U V W X Y Z
Littérature  ->  Romans & Nouvelles  
 

Malaise d’après-guerre
John Dos Passos   La Grande époque
Gallimard - L'Imaginaire 2007 /  10 € - 65.5 ffr. / 325 pages
ISBN : 978-2-07-078639-8
FORMAT : 12,5cm x 19,0cm

Traduction de Jean Rosenthal.
Imprimer

La Grande époque n’est pas le roman le plus célèbre de l’écrivain américain John Dos Passos (1896-1970) qui connut une gloire littéraire assez incroyable avec la fameuse Trilogie USA qui comprend Le 42è parallèle (1930), 1919 (1932) et La Grosse galette (1936). Manhattan Transfer, écrit en 1925, et qui décrit la vie à New York au début du siècle dernier, avait déjà lancé la carrière de l’écrivain. La Grande époque a été écrit en 1958, c’est-à-dire durant la seconde partie de la carrière de l’écrivain.

Artiste sensible (il était aussi peintre), Dos Passos rendit célèbre ce que l’on a appelé la technique littéraire du «courant de conscience», sorte de monologue intérieur qui montre en gros la pensée d’un personnage en même temps qu’elle s’opère. Et c’est le cas dans le roman auquel nous nous intéressons à l'occasion de sa parution dans la collection «L'Imaginaire» chez Gallimard.

Roland Lancaster, dit Ro, est ce que l’on appelle un journaliste sur la fin. Approchant de la soixantaine, il sait pertinemment que sa carrière est derrière lui, mais son travail est tout ce qui lui reste de tangible, sa femme étant décédée ; l’homme vieillissant n’est plus que l’ombre de lui-même. Lors d’un voyage à Cuba où il embarque avec la jeune Elsa, femme un peu superficielle et frivole qu’il a rencontrée il y a peu, il espère relancer son existence en faisant un dernier bon reportage. Mais rien de tout cela n’arrive. Entre deux verres avec la jeune femme ou avec d’autres protagonistes locaux, il va se souvenir des années de guerre auxquelles il a participé en tant que reporter, années de conflits qu’il a couvertes de près, toujours en phase avec un événement militaire ou diplomatique de premier ordre. C’est ainsi qu’il va replonger dans l’atmosphère des combats fluviaux ou aériens, de la bombe nucléaire, de l’Europe dévastée, du procès de Nuremberg sans pour autant oublier son passé familial et privé ; sa femme Grace et ses collègues journalistes, Roger Thurloe ou Mortimer Price, qui ont influé sur l’homme brisé qu’il est aujourd’hui. Ces souvenirs tournent à l’obsession, et le lecteur remarque cette tragique rupture qui existe entre son passé d’aventurier et son présent marqué par la désillusion et une sorte de déchéance morale.

Tout le livre est construit autour de ces ruptures : passé/présent, guerre/paix, mariage/célibat, quotidien pauvre/souvenirs intenses. Son voyage à Cuba ne se déroulant pas comme prévu, il se remémore sempiternellement, le temps de longs chapitres, ses souvenirs de guerre dans le Pacifique, ses drames personnels, la couverture du procès de Nuremberg ou encore son influence durant le dernier mandat de Roosevelt. Ses analyses personnelles sur les situations décrites sont celles d’un journaliste audacieux, catapulté par son métier dans des zones dangereuses, au cœur des conflits et des décisions politiques. Cette vie trépidante, qui le dépasse en fait, est perçue comme un exemple qui s’éloigne petit à petit de sa vie de pré-retraité. Le livre est construit sur cette dichotomie : une narration faite à la troisième personne du singulier lorsque Lancaster se trouve à Cuba à la fin des années 50 et le passage à la première personne lorsque ce dernier évoque son passé de reporter de guerre. Cette distinction grammaticale insiste d’autant plus sur la distance qu'elle met Lancaster dans son présent afin de revivre un passé révolu mais nostalgique.

Roman du désenchantement, de la nostalgie, et de la mélancolie, La Grande époque n’est pas le grand roman de Dos Passos. On se noie un peu dans cette accumulation de souvenirs de guerre et de ce présent peu reluisant. Le style, volontairement journalistique, s’il peut émouvoir en décrivant de manière sensible et directe un événement historique ou intime, finit par lasser et se perdre dans une accumulation d’anecdotes parfois peu convaincantes. C’est dommage car l’on devine que Lancaster pourrait être le double de Dos Passos qui a couvert véritablement le conflit entre 1942 et 1947. Peut-être que la conversion de ses souvenirs en roman n’a pu s’adapter pleinement au genre. Des mémoires de guerre auraient peut-être suffi. Restent quelques passages à saluer et qui n’appartiennent qu’aux grands écrivains, comme l’était Dos Passos.


Jean-Laurent Glémin
( Mis en ligne le 11/01/2008 )
Imprimer
 
SOMMAIRE  /  ARCHIVES  /  PLAN DU SITE  /  NOUS ÉCRIRE  

 
  Droits de reproduction et de diffusion réservés © Parutions 2024
Site réalisé en 2001 par Afiny
 
livre dvd