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Amour et vide sur fond de piano
Pauline Flepp   Un sourire particulier
Editions Max Milo 2008 /  18 € - 117.9 ffr. / 283 pages
ISBN : 978-2-353-41023-1
FORMAT : 13,5cm x 20cm

Date de parution : 20/08/2008.
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Impossible, à la lecture d'Un sourire particulier, de ne pas songer au «charmant petit monstre» dont parlait François Mauriac ; Pauline Flepp joue les héritières de Sagan avec une application qui confinerait à l'exercice de style si la plume ne trahissait pas un caractère bien à soi. Très jeune auteur de vingt ans, elle puise dans sa vie de lycéenne la matière d'un récit que l'on devine très largement autobiographique : l'héroïne ne s'appelle-t-elle pas Line ? Grande gamine de dix-huit ans déjà blasée, cynique au-delà de toute limite, elle cherche désespérément un peu de substance et de réalité dans le monde doré qui l'entoure, et de répondant chez les garçons beaux comme des dieux dont les visages ont su l'émouvoir. On retrouve ce regard dont la sagesse et l'acuité désarment, pour ne pas dire effraient de la part d'un écrivain de cet âge, ce désabusement mêlé à une participation sans illusion aux errements de la jeunesse de son époque. Mais, contrairement à la narratrice de Bonjour Tristesse, Line ne se satisfait pas du vide qu'elle lit autour d'elle, elle rejette de toutes ses forces la superficialité et traque avec avidité «l'Instant», ce moment magique où l'on se fond dans autre chose, mettant ainsi à jour l'être. Elle conjugue donc une amertume et un pessimisme assumés avec une quête d'absolu, une irrépressible horreur du vide.

Tiraillée entre des aspirations incompatibles, elle cherche refuge dans la beauté, sans doute parce que cette dernière se situe par-delà le bien et le mal ; elle la trouve dans la musique, mais aussi, et surtout, chez Andrea d'une part, et Julien de l'autre. Tous deux pianistes, tous deux diaboliquement beaux, ils incarnent à leur façon deux pôles de la personnalité de Line. Julien, le cynique magnifique et glacé, semble être son horizon indépassable, probablement parce qu'elle lui envie cette parfaite indifférence, ce sourire distant qui l'ont charmée. Andrea, c'est l'artiste au coeur d'enfant, amoureux de la vie et pourtant tenaillé lui aussi par des angoisses sans nom, c'est le rêve inaccessible : il lui plairait tant de pouvoir croire comme il s'efforce encore de croire ! Andrea l'aime sans réserve, Julien se dérobe perpétuellement. De nouveau, on est tenté d'évoquer Sagan (rappelons d'ailleurs qu'elle a écrit Un certain sourire, la coïncidence des titres semblant tout sauf probable, tout spécialement de la part d'une étudiante de lettres modernes) et son ouvrage Aimez-vous Brahms ? dans lequel l'intrigue amoureuse se recoupe assez exactement avec celle d'Un sourire particulier. La réflexion sur la fragilité induite par l'extrême beauté renouant de plus avec celle de Garde du coeur...

Le style de Sagan – cette mélodie grise et rouge, parfois sarcastique et souvent triste à mourir à force de détachement – s'avérant inimitable, que peut-on dire de celui de Pauline Flepp ? Tout d'abord, il faut lui reconnaître une dextérité inattendue, une richesse de vocabulaire et une sûreté du ton impressionnante. Toutefois, certains revirements, d'un style à l'autre, d'un lyrisme extrême à un détachement presque scientifique, se révèlent étranges ; on ne peut pas dire que cela soit laid, puisqu'après tout ils retranscrivent ainsi la double personnalité de Line, mais cela surprend et prend de temps en temps le lecteur à contre-pied. De manière générale, si l'exaltation de P. Flepp touche, ses manies de philosophe sont sans doute un petit peu moins crédibles, tout comme les masques sérieux et distants de Line n'allaient finalement pas beaucoup plus loin qu'une pose. Ou peut-être cela signifie-t-il simplement que les théories supportent moins la répétition que les rêveries.

Quoiqu'il en soit, et malgré le caractère un peu agaçant du côté doré, parfait, de la jeunesse gâtée que nous présente P. Flepp, Un sourire particulier vaut pour la soif d'absolu qu'on y lit, pour quelques très jolies phrases, et pour avoir montré ce que devrait être une autofiction réussie : un roman qui raconterait sa vie, mais parce que l'on aurait auparavant vécu sa vie comme un roman.


Aurore Lesage
( Mis en ligne le 15/09/2008 )
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