| Tiery Bourquin Le Frère préféré Editions Héloïse d’Ormesson 2008 / 18 € - 117.9 ffr. / 231 pages ISBN : 978-2-350-87090-8 Imprimer
Une histoire damour interdit, tout le souffre de lhomosexualité, celui de linceste, sans parler du détournement de mineur
Le narrateur revient sur une semaine autre, quand il partagea la compagnie de son frère, en fait demi-frère, de passage à Paris, être quil aime follement, téléguidé par une névrose anonyme.
Il est étudiant, son jeune cadet est encore lycéen. Ils déambulent dans les rues de la capitale, plusieurs centaines de jours avant lan 2000, compte à rebours inscrit sur les sourires dacier de la tour Eiffel. Ils ont élu domicile dans une brasserie typique du 15ème arrondissement et retrouvent, la nuit venue, une chambre exiguë, boudoir de leur secret. Là, notre amoureux maudit bade son frère, ladmire
le mate alors quil fait sa toilette. Et, entre les crapahutages diurnes et les mauvais rêves de la nuit, quelques caresses, un peu de cet amour mis en chair, avec lacquiescement mutique du petit frère aimé. Cest la première partie de ce roman.
La suite inscrit le narrateur dans les errances dun amour non étanché, quil détourne dans les bras dun autre ; il sappelle Philippe, est poète, lui aussi torturé. Puis dans les divagations dun être incompris, ce narrateur amoureux, fratricide aimer son frère dun amour non fraternel, nest-ce pas le nier comme frère?
- , terriblement seul au monde, porteur dun tabou gigantesque, mais aussi artiste égotiste, nombriliste, attentif à sa propre dépression, à cet esseulement complaisamment étudié et mis en mots. «En somme, quand trouverai-je que la vie est chose bien naturelle ?» (p.92). Tout est là
Enfin, mise en abîme, à tous les sens du terme. La narrateur dit écrire un roman où il raconte tout cela, le publie et reçoit les foudres de tous, la famille, cette société peu sensible à lamour «vrai» qui lanime. Doù des pages violentes, au lyrisme outrepassé, sur une belle-mère décrite en harpie contre ce non-fils aîné de son fils à elle ; et tout un laïus sur la solitude du poète.
Qui ne peut avoir tord puisquil tient le Beau, lAmour, entre ses mains. Pourquoi ces reproches de la part dune mère ? Lenfer venant des autres, le poète un rien aliéné se contente de rimbaldiser sur sa condition, à la fois si belle et misérable, plutôt que de porter cet amour à la question, desquisser lécriture dune psychanalyse, de dire en quoi le frère inspire cet amour. Celui-ci, en effet, nexiste pas, tout entier dévoré, comme lenfant dans logre de Goyat, par cette passion aveugle, démente, négation de lamour-même. Amour, du coup, auquel on ne croit pas, démence renfermant à chaque page le narrateur dans sa lugubre thébaïde
Il reste seul, décidément.
Bruno Portesi ( Mis en ligne le 06/10/2008 ) Imprimer | | |