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Littérature -> Biographies, Mémoires & Correspondances |
| Julien Green Mon Amérique Fayard 2008 / 17 € - 111.35 ffr. / 193 pages ISBN : 978-2-213-63781-5 FORMAT : 13,5cm x 21,5cm
L'auteur du compte rendu : Essayiste, romancier, Jean-Laurent Glémin est titulaire dun troisième cycle en littérature française. Ayant travaillé notamment sur les sulfureux Maurice Sachs et Henry de Montherlant, il se consacre aujourdhui à lécriture de carnets et de romans. Il na pas publié entre autres Fou dHélène, LImprésent, Fleur rouge, Chair Obscure, Continuer le silence. Imprimer
Dix ans après la mort de son auteur, on retrouve ou lon assemble des textes restés plus ou moins inédits de Julien Green (1900-1998). Lan dernier, LInconnu et autres récits permettait de retrouver Green dans la fiction narrative avec une série de nouvelles. Cette fois-ci, cest le chroniqueur et le mémorialiste qui, à travers une vision personnelle de lAmérique et du Sud (il fit ses études à luniversité de Virginie et vécut un temps à Savannah), se raconte au fil des années. Ce recueil darticles et de parutions diverses parcourant les années 30 et 40 revient à la fois sur les lieux symboliques que Green a fréquentés dans sa jeunesse puis au cours de voyages, ainsi que sur quelques auteurs singuliers qui lont influencé : Poe, Hawthorne, Dickens, etc. Le tout dans un contexte de guerre mondiale.
Histoires de rencontres avec des inconnus dans un refuge échoué à la frontière du Canada, de retrouvailles dans le Massachusetts avec un ancien collègue ambulancier de la première guerre, la visite du cimetière de Baltimore où repose Edgar Allan Poe, une soirée passée à Détroit, les retrouvailles avec Savannah et New York, etc. Voilà de quoi alimenter ce recueil avec, en toile de fond, le regard toujours alerte, curieux et nostalgique de Julien Green, écrivain sensible sil en est.
Un certain nombre des textes publiés dans ce livre ont été écrits durant la Seconde Guerre mondiale, Green sétant exilé aux USA, et cest bien évidemment le conflit qui ressort des conversations, des observations et des lectures quotidiennes. Green, avant un certain nombre de ses confrères, avait souligné dans son Journal la monté des périls en Allemagne dès le début des années 30 sans foncer tête baissée au parti adverse comme les surréalistes et autres écrivains staliniens. En observateur acharné mais discret, il va seffacer pour reporter les discours des uns et des autres : sur lamitié qui lie la France aux États-Unis, puis sur quelques rencontres improbables, Gertrude Stein, André Breton
Le pacte germano-soviétique soulève des tempêtes outre-Atlantique quand Green survole New York afin de retrouver ses marques. Un parfum de guerre et de tensions permanentes recouvre lensemble des descriptions qui partent du très grand (Les Chutes de Niagara) pour arriver au plus précis (un escalier dune maison du Michigan). Green se veut ici un témoin privilégié, un mémorialiste conscient du travail de lécrivain : rapporter dans une langue nostalgique et précise les menus faits sur ces années de doute, de sang et de fragilité.
Heureusement, quelques plaisirs viennent sy adjoindre : le cinéma américain où Gide lemmenait naguère, la lecture de Hawthorne, écrivain qui a influencé Green de bien des manières, et quelques descriptions des recoins et des éléments naturels quil ne veut pas quon passe sous silence : ici un chêne, là le chant dune grive. En cela, la littérature de Green est de celles qui veulent laisser un petit quelque chose dans un recoin dune mémoire puis dun livre. Doù limportance du souvenir, de lanecdote, de la chronique. LAmérique de Julien Green, cest cette fracture qui la conduit à écrire dans les deux langues (français-anglais) et à vivre dans les deux continents. Paris lui manque en temps de guerre quand New York lappelle quand quil écrit ses romans en France. Doù les diverses personnifications quil affuble aux deux pays chers à son cur et à ses racines.
Mon Amérique, cest un avant goût du Green diariste. Une série de chroniques touchantes, historiques et personnelles qui proposent au lecteur une promenade dans les terres de son enfance, mais aussi une réflexion sur le monde contemporain à la veille de lintervention américaine sur les plages normandes. Une fois de plus, lhistoire aura donné raison à Green en unissant ces deux peuples. Un livre de Green, lAméricain français, à lire paisiblement.
Jean-Laurent Glémin ( Mis en ligne le 19/01/2009 ) Imprimer
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