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Histoire d'un entrepreneur au pays des Ténèbres et de la Lumière
Aravind Adiga   Le Tigre blanc
10/18 - Domaine étranger 2010 /  8,20 € - 53.71 ffr. / 318 pages
ISBN : 978-2-264-04867-7
FORMAT : 11cmx18cm

Première publication en septembre 2008 (Buchet Chastel)

Traduction d'Annick Le Goyat.

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Le roman prend la forme d'une suite de lettres : sept au total, adressées au Premier Ministre chinois par un riche Indien. Apprenant la visite de l'homme d'État, celui-ci a décidé de lui dévoiler le secret de la réussite indienne : «il semblerait, monsieur, que vous autres Chinois, vous nous devanciez largement dans tous les domaines, à une seule exception : vous n'avez pas d'entrepreneurs. Or notre nation, bien que dépourvue d'eau potable, d'électricité, de système d'évacuation des eaux usées, de transports publics, d'hygiène, de discipline, de courtoisie et de ponctualité, possède des entrepreneurs». L'auteur des lettres, qui ne dévoile d'abord de lui que le surnom de «tigre blanc», est l'un d'entre eux. Aussi, se propose-t-il de montrer à travers son propre parcours, dont la représentativité n'est pas la moindre qualité à ses yeux, ce qui caractérise un créateur de start-up à la mode indienne.

Les spécificités de ce genre d'individus sont décelables dans la plus brève des descriptions ; celle que l'on trouve sous une photo floue placardée dans tous les lieux publics, par exemple, celle d'un avis de recherche – le sien. Prenant appui sur la liste sommaire de ses particularités telles que la police les a recensées, il remonte le temps. On découvre sa petite enfance misérable, sa difficile sortie du village natal, sa brusque et flamboyante ascension sociale ; surtout, on y lit une analyse violente, sombre, et presque impuissante d'un système qui broie les hommes et sanctifie une corruption omniprésente, putréfiée, immonde : le système de la Cage aux poules.

Balram – bien que son prénom véritable soit Munna, ses parents n'ont pas eu le temps de lui donner un nom autre que garçon, munna dans leur langue – a choisi de s'en échapper. Et pourtant, avoue-t-il, «seul un homme prêt à voir sa famille détruite – pourchassée, battue et brûlée vive par ses maîtres – peut s'évader de la cage. Pour cela il ne faut pas être une personne normale, mais un monstre, un dénaturé. Pour cela il faut être un Tigre blanc». Le tigre blanc est un animal dont il est réputé naître dans la jungle un seul exemplaire par génération. «C'est l'histoire d'un entrepreneur social qui vous est contée ici, monsieur», conclut Balram.

La frontière de l'humanité est perpétuellement remise en question dans cet ouvrage pour le moins dérangeant. La honte ressentie par le narrateur lorsque la femme de son maître lui fait réaliser sa saleté est extrêmement choquante, bouleversante. Le caractère très corporel, très concret que prend la domination est évoqué, suggéré, répété à maintes reprises ; après tout, n'est-ce pas logique quand on parle d'un droit de vie et de mort ? Et pourtant, le prix à payer pour obtenir la «liberté» est si exorbitant qu'un lecteur un peu humaniste, par exemple, pourrait se demander si l'homme qui s'en acquitte devient réellement plus humain que celui qui reste dans la boue répugnante d'un univers mi-animal mi-féodal. Car c'est finalement entre le monstre et la tête de bétail qu'il faut choisir ses perspectives d'avenir.

Pourtant, la complexité des personnages, leur façon fluctuante de considérer l'humanité de la classe énorme des domestiques, c'est-à-dire peu ou prou des esclaves, tout contribue à brouiller les pistes et à éviter au roman d'Aravind Adiga de sombrer dans le manichéisme. Parce qu'il ne répond à aucune question sociale et politique tout en développant une multitude de problèmes, Le Tigre blanc interpelle ; sans le moindre doute, il s'agit d'un roman très fort dont le ton à la fois placide, révolté et cynique ne peut laisser le lecteur indifférent.


Aurore Lesage
( Mis en ligne le 19/04/2010 )
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