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La vieille dame qui ne savait pas vouvoyer…
Douna Loup   Les Lignes de ta paume
Mercure de France 2012 /  15,50 € - 101.53 ffr. / 162 pages
ISBN : 978-2-7152-3282-2
FORMAT : 14,0 cm × 20,3 cm
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C’est l’histoire d’une vieille dame qui ne savait pas vouvoyer ; de son enfance mouvementée sur les chemins de l’Europe, elle a retenu que le meilleur moyen de vivre sa vie était de tenter toutes les aventures qui passaient à sa portée. La narratrice, une jeune fille, reconstitue le fil de ce chemin de vie, accrochant des mots aux souvenirs que lui raconte Nelly, l’héroïne.

Son enfance ? Sous le signe de l’instabilité, elle va se construire une personnalité riche de tous les défis qu’elle se sera lancés ; au milieu de quatre sœurs (deux plus jeunes et deux aînées), elle va sans cesse être cette «fille de l’entre-deux», tentant toute sa vie de se construire dans le peu d’intervalle que lui laissent ses parents et ses sœurs ("Tes sœurs modèles ramènent des carnets impeccables et tes sœurs cadettes forment leur clan secret, toi tu rêvasses contre les murs").

Les voyages, ou plutôt l’errance, seront son chemin : née à Bagnolet, en 1926, elle connaîtra divers domiciles, dans la Marne, en Suisse, puis dans le Jura, pour finalement échouer à Belfort. De cette enfance nomade, elle gardera une absence de racines qui la fera s’attacher aux gens plutôt qu’aux lieux ("Je suis née au-delà des frontières. Je mourrai transfrontalière. Je ne sais me tenir qu’aux lisières").

Sa mère a des velléités de suicide : une poutre propice à la pendaison, un revolver qui traîne dans la maison, un étang qui attire la noyade ne suffisent pas à transformer ces tentatives en réussites. Nelly rencontrera un couple d’instituteurs particulièrement atrabilaires, qui, avec force humiliations et brimades, forgeront aussi son caractère indépendant. Quand elle a quatorze ans, c’est un professeur de piano pédophile qui tente de la violer, elle décide alors de se murer dans le silence et devient volontairement muette ; c’est un garçon de vingt ans, quelques années plus tard, qui, amoureux d’elle, lui rendra la parole et la baptisera au passage «Linda», «jolie» en espagnol, prénom qu’elle gardera jusqu’à sa mort. Linda se lance alors avec succès dans la coiffure où ses dons créatifs font merveille et lui procurent un succès certain. Un beau jour, elle participe à un «atelier créatif» et décide de tout plaquer pour se lancer dans la peinture et la sculpture… Elle finira sa vie dans un appartement genevois, entourée de plus de quatre mille tableaux et sculptures…

Dans les lignes de la paume de Nelly–Linda, la narratrice a vu l’histoire d’une femme libre, qui n’a de cesse de tenter chaque jour de nouvelles expériences, et de construire une vie en harmonie avec la nature et avec ceux qu’elle aime : «La vie me révolte. A bras-le-corps, je la révolutionne. Je n’y ai jamais rien gagné mais, en bafouant ses codes, je me serai au moins brûlée de près au rêve de ma liberté».

On nous dit sur la quatrième de couverture que Linda existe, et que le livre a été écrit sans rien inventer et en inventant tout. L’important n’est pas de savoir la part de vérité dans la vie de Nelly, mais plutôt de goûter au romanesque de cette vie si riche et si inventive. Les mots de Douna Loup sont simples et toujours directs, avec une poésie qui puise dans la nature les traces des sentiments, des comportements humains. «Tu me laisses, tu raccroches et je regarde au travers des gouttes sur la vitre les larmes de sang d'une vieille dame à l'énergie aussi vive et tonitruante que le tambour des pluies".

Douna Loup a trente ans et vit en Suisse. Après L’Embrasure (2010), Les Lignes de ta main  est son deuxième roman.


Michel Pierre
( Mis en ligne le 12/11/2012 )
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       de Douna Loup
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