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Recomposer le réel
Georges Roque   La Stratégie de Bonnard - Couleur, lumière, regard
Gallimard - Art et artistes 2006 /  23 € - 150.65 ffr. / 273 pages
ISBN : 2-07-077508-9
FORMAT : 16,5cm x 22,0cm

L'auteur du compte rendu: Marion Perceval a suivi les cours de premier et de deuxième cycles de l'Ecole du Louvre (option histoire de la photographie). Elle prépare actuellement une thèse d'histoire des techniques sur les Sociétés d'amateurs photographes à la fin du XIXe siècle et la technique photographique.
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Pierre Bonnard, le plus grand peintre du XXe siècle : voilà le postulat provocateur de Georges Roque dans son ouvrage La Stratégie de Bonnard, publié par les éditions Gallimard, dans leur très belle collection "Art et Artistes".

Séduisant, délicat, gracieux et intimiste, souvent pris dans leur signification péjorative, tels sont les qualificatifs les plus fréquemment utilisés pour désigner l’œuvre de Pierre Bonnard (1867-1947). Contemporain de Matisse, il n’aura pas sa carrière, connu et reconnu à la fois par le public et les critiques. Son œuvre sera plus discrète mais non moins révolutionnaire. Car comme Matisse, il pose la question essentielle du décoratif dans l’œuvre et dans l’histoire de l’art du début du XXe siècle.

Mais quelle est donc cette stratégie dont parle Georges Roque ? L’auteur, petit à petit, détaille chacune des idées reçues sur le peintre ; il les analyse et les réfute. Bonnard débute sa carrière parmi le groupe des Nabis, ces «prophètes» d’une nouvelle peinture, née autour de 1890 sous le parrainage de Gauguin. Mêlant l’utilisation des aplats colorés, la simplification des formes et les recherches sur le motif et la ligne, les Nabis prônent un art global, sans distinction entre les arts appliqués (ils créeront des tapisseries, des affiches…) et la peinture. Toute sa vie, Bonnard reste ainsi proche de peintres tels qu’Edouard Vuillard ou Maurice Denis. Mais son art se libérera de la théorie dogmatique.

En effet, il n’est pas un peintre du dogme, ce qui ne fait pas de son art un travail simpliste. Georges Roque analyse le lieu commun réduisant l’œuvre de Bonnard à l’empirisme. Cette idée est apparue dans l’une des premières biographies du peintre, publiée avec son aval. Elle fut ensuite reprise par différents historiens d’art et critiques. Pour Bonnard, la théorie surgit de la pratique et non l’inverse. Il n’applique donc pas une pensée préconçue, mais la découvre en peignant. Natanson, l’un des mécènes des Nabis, résumera d’ailleurs sa position : «Une des raisons qui donnent à Bonnard le dégoût des discussions d’esthétique et d’une façon générale des théories, c’est qu’elles arrivent à substituer des habitudes à l’attention. La confiance aux théories est responsable de cette paresse.»

Suite à cet éloignement des esthétiques «nabies», l’artiste se rapprochera des questionnements impressionnistes. La lumière va alors devenir particulièrement importante voire essentielle dans son œuvre. Le principal reproche fait à l’encontre de Bonnard est qu’il n’a jamais fait partie des avant-gardes de son temps. Il n’a jamais été mené par la volonté destructrice de ces dernières. En effet, il s’est construit et a construit son œuvre non pas par la table rase sur un passé récent mais en assimilant toutes les recherches artistiques de la fin du XIXe siècle. Impressionnisme et néo-impressionnisme, divisionnisme, questions autour de la couleur et de la ligne, il a ainsi tout intégré.

A la déconstruction du corps humain proposé par Picasso en 1907 avec les Demoiselles d’Avignon, Bonnard répond par la composition. Le cadrage de ses œuvres est toujours rigoureux, parfois photographique, souvent audacieux ; il affirme d’ailleurs : «le pouvoir d’invention réside davantage dans la mise en place et dans le sens des proportions. Tout l’art est composition : c’est la clef de tout.», soulignant de la sorte tout particulièrement l’artifice de la peinture. Le réel pour Bonnard n’est pas l’essentiel, et il va chercher à représenter la nature sans se soucier de vraisemblance. Voilà la stratégie de Bonnard : offrir au spectateur sa propre vision de la réalité sans jamais devenir abstrait.

L’ouvrage de Georges Roque est passionnant à plus d’un titre. D’un parti pris audacieux, il réussit à donner au lecteur une vision renouvelée de l’œuvre de Bonnard et lui fait prendre conscience de l’importance du peintre et de ses recherches, sans toutefois nier sa position singulière dans l’histoire de l’art.


Marion Perceval
( Mis en ligne le 24/03/2006 )
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