Alexandre Maral Le Versailles de Louis XIV - Un palais pour la sculpture Faton 2013 / 68 € - 445.4 ffr. / 338 pages ISBN : 978-2-87844-176-5 FORMAT : 24,0 cm × 30,5 cm
Catherine Pégard (Préfacier)
L'auteur du compte rendu : Archiviste-paléographe, docteur de l'université de Paris I-Sorbonne, conservateur en chef du patrimoine, Thierry Sarmant est responsable des collections de monnaies et médailles du musée Carnavalet après avoir été adjoint au directeur du département des monnaies, médailles et antiques de la Bibliothèque nationale de France. Il a publié, entre autres titres, Les Demeures du Soleil, Louis XIV, Louvois et la surintendance des Bâtiments du roi (2003), Louis XIV. Homme et roi (Tallandier, 2012), Fontainebleau. Mille ans d'histoire de France (Tallandier, 2013). Imprimer
Nul nest prophète en son pays : la plupart des travaux qui traitent de la sculpture de Versailles sont anglo-saxons ou directement écrits par des Français en langue anglaise, tandis que souvent les visiteurs du château ne considèrent les vases, les bustes et les statues qui peuplent ses appartements et ses jardins que dun il distrait.
Cest donc à un travail de réhabilitation que se livre Alexandre Maral pour mettre en évidence un patrimoine sculpté qui na pas moins dimportance que larchitecture, la peinture ou les grands décors. Pour ce faire, il nous entraîne dabord dans latelier de Versailles : le roi commanditaire, ses surintendants des Bâtiments successifs, Colbert, Louvois, Villacerf, Hardouin-Mansart, le duc dAntin, ses sculpteurs, Le Hongre, Lerambert, Coysevox, Desjardins, Marsy, Girardon. Le propos se poursuit par lévocation de la sculpture des jardins, qui est dabord une uvre éphémère de plâtre et de carton, le temps des fêtes de 1664, puis une sculpture de pierre et de plomb et enfin de marbre et de bronze.
Si le langage de la mythologie et de lallégorie quemploient les sculpteurs de Louis XIV nous est de moins en moins familier, force est de succomber au charme ou à la force que dégagent beaucoup de leurs créations : groupes denfants de lAllée dEau, tritons et dauphins de la Fontaine de la Pyramide, nymphes au bain de Girardon, Apollon de Tuby, Encelade des frères Marsy, Apollon et nymphes de Girardon et Regnaudin ou encore Chevaux du Soleil des frères Marsy. Avouons quà quelques notoires exceptions LHiver de Girardon, Le Soir de Desjardins les statues de la grande commande de 1674 font moins dimpression
et que la sculpture produite en masse pour orner les façades paraît souvent assez faible.
De la sculpture ornementale, Alexandre Maral passe à la sculpture que lon pourrait dire politique : bustes de Louis XIV par Bernin et Varin, statue équestre du roi par le même Bernin, groupe de la Renommée du roi par Domenico Guidi, groupe de la France triomphante par Tuby, Coysevox et Prou, relief de la France veillant sur le sommeil du roi par Coustou. Autant de morceaux de bravoure qui sont pour lhistorien de précieux témoignages de lidéologie monarchique.
Lesthète, lui, trouve davantage de satisfaction dans le décor des grands vases de marbre et de bronze où se pressent les Amours, les nymphes, les centaures, dans un décor fantastique de feuillages, de palmes, de pampres, de guirlandes et de bucranes, et dans les réalisations de la dernière partie du règne, celle où prévaut le mot dordre royal de «lenfance répandue partout». Cest lâge des jeux denfants du Salon de lil-de-buf et du grand buffet deau de Trianon. Le dernier grand chantier de sculpture du règne, celui de la chapelle royale, porte la marque de cette consigne, et les reliefs qui couvrent ses murs sont plus aimables que majestueux.
Le livre se clôt sur une passionnante évocation de la destinée des sculptures du Versailles de Louis XIV après Louis XIV jusquaux dernières opérations de restauration et de mise à labri des uvres menacées par le vandalisme ou la pollution. Nul naurait pu mieux que lauteur, actuel responsable de ce patrimoine au château, tirer un bilan de ce qui a été fait dans les dernières années
comme de tout ce qui reste à faire.
Alexandre Maral est lauteur du texte, mais aussi dune grande partie des photographies qui lillustrent. Cest dire que ce livre est le fruit dune enquête historique savante mais aussi dune observation patiente et amoureuse, au fil des jours, des uvres quil étudie.
Thierry Sarmant ( Mis en ligne le 14/01/2014 ) Imprimer |