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| Ernst Hans Gombrich Gombrich : l'essentiel Phaidon 2003 / 49.95 € - 327.17 ffr. / 624 pages ISBN : 0-7148-9074-X FORMAT : 17,2 x 24,5 cm
The essential Gombrich (Phaidon, 1996), traduit de l'anglais par A. Béchard-Léauté, D. Collins, J. Combe, G. Durand, D. Lablanche et C. Lauriol.
A lire aussi :
- Histoire de l'art, Phaidon, mai 2003, 688 pages, 49.95 .
- Méditations sur un cheval de bois, Phaidon, septembre 2003, 256 pages, 24.95 .
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Lhistoire de Ernst Hans Gombrich, éminent historien de lart, disparu en 2001, est inséparable de laventure éditoriale Phaidon. Cest dans le cadre de lexil autrichien en Angleterre quHorowitz rencontre Gombrich en 1942 et lui demande la rédaction dune histoire de lart. The Story of Art paraît chez Phaidon en 1950 et devient rapidement un best-seller mondial (publié à nouveau cette année en France chez le même éditeur), participant largement à la démocratisation de lart. Story of Art est en effet une histoire contée (story) et non celle parfois plus absconse pratiquée par les historiens (history). Le grand succès de Gombrich vient d'une narration accessible, une plume simple et didactique, et une érudition exceptionnelle.
Cette aventure éditoriale se prolonge aujourdhui dans la publication française de The essential Gombrich paru outre-Manche en 1996. Il sagit dune somme gombrichienne, sorte danthologie réunissant sur un demi-siècle des passages de ses écrits les plus fameux (Histoire de lart, Lart et lillusion, The Sense of Order
), ainsi que des articles, interventions radiophoniques et conférences aux quatre coins du globe.
Gombrich lessentiel est une invite à la découverte du personnage et de ses écrits. Dans la lignée de Panofsky, Warburg ou Wölflin, Gombrich est certainement lun des plus grands historiens de lart du XXe siècle. Spécialiste de la Renaissance (sa thèse portait sur larchitecture de Jules Romain), il sillustre dans le présent ouvrage par des réflexions passionnantes sur le dessin chez Léonard, le palais du Té et le maniérisme, la Chambre des Signatures au Vatican par Raphaël ou encore lémergence de la Renaissance à Florence au Quattrocento. En véritable érudit, ses propos dépassent largement les trois siècles de la Renaissance, pour aborder également la peinture hollandaise, Poussin, le romantisme, Schubert, Goethe ou encore les représentations iconographiques du XXe siècle.
Ni prisonnier de découpages chronologiques hâtifs, ni enfermé dans la seule discipline de lhistoire de lart, Gombrich sintéresse également à liconologie, à lesthétique et à lépistémologie. On conseille vivement la lecture de «A la recherche dune histoire de la culture», conférence professée en 1967 à Oxford, dans laquelle, en plein trend structuraliste, luniversitaire autrichien prône une histoire du culturel, point de vue alors révolutionnaire, aujourdhui banalisé. On comprend quil fut en la matière un éclaireur dimportance. «Il me semble que le monde universitaire est très lent à répondre à ce besoin croissant. Dans nos universités, histoire signifie encore largement histoire de la politique et peut-être histoire de léconomie.» (p. 394)
Pour autant, Gombrich ne fut pas un historien déconnecté des réalités sociales et concrètes de la production artistique. Tout au contraire, il fut lun des grands promoteurs dune histoire des continuités, d'une chaîne des traditions expliquant lévolution des styles. Ainsi, son interprétation du maniérisme soppose à celle de Dvörak voyant dans ce courant artistique lillustration dune crise de civilisation également incarnée par le sac de Rome en 1927. Gombrich cherche plutôt à rendre compte du maniérisme sur le terrain en insistant sur ses liens avec le classicisme à lantique. «Je ne pense pas que lon puisse considérer le maniérisme comme un style anticlassique, mais il est certain quil fut un style postclassique, qui a parasité, en quelque sorte, le style classique.» (p. 407)
La psychologie et les questions de représentation sont centrales dans son traitement de lart. «Les uvres dart [
] possèdent une puissance magique de métamorphose, que les mots ne peuvent exprimer.» (p. 85) Lintérêt pour les stéréotypes, les caricatures et les arts dits populaires ou décoratifs, le primitivisme, etc., est expliqué par cette volonté de scruter tant lil du spectateur que le tour de main de lartiste. Doù son immense intérêt pour son compatriote, Freud. Ces questions font lobjet dun autre écrit de Gombrich, récemment publié par Phaidon : Méditations sur un cheval de bois est un recueil dessais exprimant la réflexion de Gombrich sur les phénomènes de perception artistique.
Gombrich : lessentiel ajoute au mérite de ces écrits si stimulants, un remarquable travail éditorial. Les éditions Phaidon sont connues pour lexcellente qualité de leurs productions. Le présent ouvrage le confirme : le choix des textes et leur classement en onze sections sont des plus pertinents. Surtout, chaque article bénéficie dune présentation par léditeur sous forme de «post-scriptum» où sont résumés à grands traits les propos de Gombrich, complétés par dutiles références bibliographiques. Un index complète la maniabilité de lobjet.
Il faut se jeter dans cette somme. Hautement cultivants, ces passages gombrichiens permettent aussi une escapade dans le monde un peu trop clos des esthètes et des spécialistes de lart : Riegl, Huizinga, Warburg, Vassari, Burke, Burckardt sont des noms avec lesquels on se familiarise alors. Luniversalité et laccessibilité de lart restent cependant le leitmotiv de lauteur. Il écrit ainsi : «Il y a toujours, dans lart, du nouveau à découvrir. Les grandes uvres semblent différentes chaque fois quon revient vers elles. [...] Lessentiel réside peut-être en ceci quil faut les aborder avec un esprit non prévenu, prêt à saisir la moindre allusion et à faire écho à lharmonie la plus cachée.» (p. 79)
Thomas Roman ( Mis en ligne le 07/11/2003 ) Imprimer | | |
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