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Beaux arts / Beaux livres -> Histoire de l'art |
| Daniel Arasse Histoires de peintures Gallimard - Folio essais 2006 / 7 € - 45.85 ffr. / 357 pages ISBN : 2-07-032081-2 FORMAT : 11x18 cm
Première publication en novembre 2004 (Denoël).
Lauteur du compte rendu : Emmanuel Bain est agrégé dhistoire, il est actuellement allocataire-moniteur à lUniversité de Nice Sophia-Antipolis, où il prépare une thèse en histoire médiévale. Imprimer
D. Arasse a disparu le 14 décembre 2003. Ces Histoires de peintures, transcriptions dune série de vingt-cinq émissions tenues sur France-Culture durant lété 2003, constituent comme une rapide autobiographie intellectuelle. Ce livre est à à lire comme un témoignage sur la façon dont Daniel Arasse abordait la peinture.
Il sy dévoile en même temps quil dévoile des ″mystères″ picturaux. Le lecteur y retrouvera ses goûts, ses thèmes de prédilection, ceux quil avait abordés dans ses publications précédentes : lannonciation italienne et lhistoire de la perspective, Léonard de Vinci, le maniérisme, Vermeer, le détail, et finalement Kiefer. Il y retrouvera aussi des anecdotes autobiographiques régulièrement distillées sur la visite des chapelles, sur la découverte dincongruités, sur ″la thèse volée″
Mais D. Arasse, avec un sens pédagogique extraordinaire et une volonté de convaincre sans faille, construit surtout une défense et illustration de son approche des peintures. Les remarques méthodologiques sont présentes à tous les chapitres. Il y défend une étude rapprochée de la peinture attentive aux détails inattendus, susceptibles de faire sortir lhistorien de la torpeur de sa connaissance, de ses interprétations déjà faites, pour mettre en branle toutes les ressources de la réflexion. La peinture pense : ce postulat guide des interprétations. Il sagit pour lhistorien de lart de découvrir la pensée à luvre dans la peinture, et ainsi de penser lui-même. Aucun moyen ne doit être négligé : même les anachronismes, même les analyses historiquement fausses, comme celles de Foucault sur les Ménines, doivent être utilisés, paradoxalement, pour mieux comprendre une uvre. Mais la rigueur intellectuelle guide constamment les interprétations. De plus lhistorien de lart doit avant tout être un historien. Plus quune méthode, il doit posséder une familiarité avec les uvres et avec leur époque. Cette connaissance permet à la fois de comprendre les uvres en les replaçant dans un contexte social et politique auquel il recourt pour expliquer la perspective ou le maniérisme mais aussi de mieux découvrir leur originalité, ce en quoi elles échappent à leur temps.
Ces Histoires de peintures présentent toutefois les limites incluses dans le projet lui-même. Si la première moitié du livre, qui porte essentiellement sur la perspective, est très convaincante, parce que lauteur prend le temps davancer ses interprétations puis de les nuancer, en montrant dune part comment les peintres ont différemment joué des règles, dautre part les différences régionales, les chapitres de la deuxième moitié du livre, qui évoquent plus de sujets, peuvent paraître trop allusifs ou trop rapides. Cest que ce livre ne doit pas être lu comme une histoire de la peinture, mais comme une incitation au regard et à la réflexion, ce en quoi son but est parfaitement atteint.
Emmanuel Bain ( Mis en ligne le 21/02/2006 ) Imprimer | | |
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