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''Le passé ignoré confisque les lendemains…''
Léonora Miano   Les Aubes écarlates
Pocket 2011 /  6.60 € - 43.23 ffr. / 260 pages
ISBN : 978-2-266-20058-5
FORMAT : 11cm x 18cm

Première publication en août 2009 (Plon)
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Il y a roman et roman… D’un côté se multiplient les propos anecdotiques, les livraisons attendues et les introspections inutiles de jeunes trentenaires ou de mélancoliques quinquas… tandis que d’un autre côté luisent quelques pépites : des histoires qui puisent leurs rythmes aux battements du monde pour en dire la violence, la beauté et l’inachèvement. Les Aubes écarlates de Léonora Miano appartient à cette dernière catégorie.

Dernier volet du triptyque commencé en 2005 avec L’Intérieur de la nuit, et poursuivi en 2006 avec Contours du jour qui vient, ce texte «sciemment chaotique» selon son auteur, achève de raconter la conscience incomplète de l’Afrique, en abritant à la fois le récit du jeune Epa, enrôlé de force par les rebelles, et laissant entendre en même temps les voix oubliées de tous ceux qui furent déportés de force, par le passé, vers l’autre côté de l’océan.

Blessé et mal en point, Epa est recueilli par Ayané dans la maison d’une femme blanche que tous appellent «La Colombe». A mesure qu’il se remet, il raconte son enlèvement et celui des autres enfants du village d’Eku et leur intégration dans les troupes rebelles d’Isilo, un petit chef local, ivre de grandeur et de pouvoir. Aidé d’Ayané, Epa part à la recherche des autres enfants pour les ramener à leur famille.

On retrouve ainsi les personnages d’Epa, d’Ayané et de Musango, présents dans les deux volets précédents, engagés ici dans une fable dont les enjeux sont encore spirituels et mémoriels. Leur quête est en effet rythmée par le chœur de ces voix plus anciennes, qui chantent la plainte incessante de leur oubli : «Nulle stèle ne nous conte aux vivants. (…) C’est cela que nous cherchons et que nous ne trouvons pas. Le lieu à partir duquel nous devions pénétrer dans l’autre monde». Où l’on comprend que les errances contemporaines de l’Afrique, sa violence et ses chaos multiples, résonnent de l’errance des générations sacrifiées en esclavage.

Maîtrisée dans le lexique, dans la syntaxe, comme dans le rythme, l’écriture de Léonora Miano abrite dans sa densité la complexité et l’hybridité de la culture «afropéenne». Puisqu’«être un Africain, de nos jours, c’est être un hybride culturel. C’est habiter la frontière», comme elle l’affirmait en mars 2009 à l’Institut français de Copenhague. Lire Les Aubes écarlates revient donc à marcher sur cette frontière et à regarder ainsi des deux côtés. On retrouve ainsi en héritage le travail sur la langue des poètes de la négritude et en guise de boussole les références à Edouard Glissant et aux «post-colonial studies».

Les Aubes écarlates s’achève, en une courte post-face, comme un plaidoyer pour une culture de la mémoire qui soit spécifiquement «africaine». Réclamer des réparations à l’Occident ne suffit pas, encore faut-il que les Africains eux-mêmes nourrissent une mémoire de leurs anciens transbordés et noyés. De la sorte, la conscience africaine pourra se réunifier, de la sorte, la violence absurde n’aura plus de prétexte pour éclater, de la sorte, les aubes ne seront plus rouges du sang des victimes de la nuit.


Thibaut de Saint-Maurice
( Mis en ligne le 29/09/2011 )
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