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La saga Kant ?
Karine Tuil   Six mois, six jours
Le Livre de Poche 2011 /  6.50 € - 42.58 ffr. / 252 pages
ISBN : 978-2-253-15972-8
FORMAT : 11cm x 18 cm

Première publication en août 2010 (Grasset)
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Une riche héritière allemande tombe sous le charme d'un imposteur. Sur cette bluette tragique, fait divers véridique, Karine Tuil règle quelques comptes avec l'histoire.

Elle s'appelle Julianna Kant, représentante de l'une des plus grandes puissances allemandes, la firme K&S aux ramifications multiples et dont les racines remontent tôt dans le XXe siècle. Elle s'énamoure de Braun, un photographe, d'un amour passion qui opacifie le jugement. Piégée, menacée par le scandale, elle doit payer. On comprend alors que le bellâtre en veut moins à l'argent qu'au passé trouble des Kant, liés au pouvoir nazi pendant la guerre, à travers la personnalité hautes en couleurs et contrastée de Magda Goebbels... première épouse d'un aïeul Kant.

Le récit passe à travers les mots de Karl Fritz, homme à tout faire de la famille, détenteur de leurs secrets, ''nettoyeur'' de leurs petites affaires, indispensable tant qu'il ne constitue pas une menace. Les compromissions de Julianne l'exposent cependant, et conduisent à son licenciement, d'une manière si abrupte qu'elle appelle la vengeance. Devant une journaliste, Fritz déballe le linge sale et, non content de révéler l'adultère de la fille Kant, il explique pourquoi et comment il est remonté jusqu'au nazisme et Magda...

Son ton est violent, gonflé par la colère et la soif de vengeance. Le monologue est ainsi prenant, et l'on voudra donc tout savoir sur les Kant et leurs histoires, appâté doublement par une histoire de fesses (le point faible des Kant) et un flirt avec les pans les plus obscurs de notre histoire... En cela, Karine Tuil réussit son affaire.

On regrette alors qu'elle n'ait pas pris plus de temps et d'espace pour aller plus loin encore et étoffer, étoffer, étoffer une épopée ici réduite à l'esquisse. Les Kant méritaient en effet une saga, que les 250 pages, ici, n'épuisent hélas pas. L'adultère n'est finalement qu'un prétexte facile à une incursion superficielle dans ce passé trouble. On aurait aimé que la romancière donne chair à ses personnages, et complique un peu plus les rapports familiaux, les dilemmes moraux, les choix faits et leurs contradictions. Bref, que le déploiement de la fiction assume sa fonction et fasse d'un conte partant d'une histoire vraie, un récit vérace.

Un roman en partie manqué pour ce qu'il contient donc de réussi.


Thomas Roman
( Mis en ligne le 31/10/2011 )
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