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Poches -> Littérature |
| Clara Dupont-Monod Le Roi disait que j’étais diable Le Livre de Poche 2015 / 6.10 € - 39.96 ffr. / 192 pages ISBN : 978-2-253-19448-4 FORMAT : 10,8 cm × 17,7 cm
Première publication en août 2014 (Grasset) Imprimer
Un court roman - on ne dira pas roman «historique» - de Clara Dupont-Monod. Le sujet certes appartient à lhistoire : la très belle Aliénor dAquitaine, première épouse du roi Louis VII à qui elle ne donna que des filles, donc incapables de régner. Les époux finirent, au lendemain dune expédition de croisade désastreuse, par obtenir lannulation de leur mariage en alléguant une consanguinité au 5ème degré interdite par lEglise (qui avait laissé le mariage se faire et lavait même encouragé
) et Aliénor quitta Paris et sa cour pour épouser Henri Plantagenet, à qui elle apporta la plus belle part du royaume, qui devint roi dAngleterre et dont elle eut plusieurs fils dont Richard Cur de lion et Jean sans Terre
Clara Dupont-Monod ne sintéresse quà un court moment de la vie dAliénor (1137-1152), celui de son mariage avec le roi de France ; elle alterne les propos quelle prête à la reine et ceux du roi (en italique). Un livre à deux voix donc, de lecture agréable pour peu quon ny cherche ni Aliénor ni la vraisemblance historique. Lauteure sen explique en fin de volume en admettant quelle a pris de nombreuses libertés avec lHistoire : «Que les historiens ne jugent ces libertés ni blasphématoires, ni hors de propos ; mais bien comme le plein exercice de limagination qui senchante à combler les vides en prenant appui sur larmature chronologique».
Clara Dupont-Monod fait donc dAliénor une guerrière libre, impitoyable, plutôt libre-penseuse, bref davantage une femme du XXIe siècle que du XIIe, et de Louis un médiocre, clerc raté, incapable de gouverner, éperdument amoureux dune épouse qui le méprise, marionnette des hommes dÉglise, Suger, Bernard de Clairvaux. Aliénor, la «sorcière» qui envoûte les hommes, et fréquente les ombres de lau-delà.
Clara Dupont-Monod oppose le Sud dAliénor chaleureux, opulent, vivant, avec ses poètes, ses combats, ses richesses, au Nord étriqué de Louis, peuplé dhommes dÉglise, de guerriers sales, dintrigues médiocres. Seule Paris la grande ville trouve grâce à ses yeux : «Paris : une femme énorme et sale qui danse parmi ses immondices». Antioche aussi, la ville de son oncle le puissant Raymond.
Pourquoi pas ?... Mais pourquoi avoir choisi un personnage historique bien connu pour le décrire de façon aussi
libre. Clara Dupont-Monod aurait pu attribuer ce portrait imaginatif à une quelconque dame de lentourage dAliénor par exemple, mais cela eût été moins «glamour» peut-être... Certes Alexandre Dumas affirmait : «Il est permis de violer lhistoire à condition de lui faire de beaux enfants». Justement, tout est là
Celui qui ne cherche que le plaisir du récit pour lui-même pourra être satisfait, celui qui penserait y retrouver une description du début du XIIe siècle sera déçu
Au lecteur de choisir !
Marie-Paule Caire ( Mis en ligne le 07/12/2015 ) Imprimer
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