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Plongés dans Whitechapel
Anne Perry   Pentecost Alley
10/18 - Grands détectives 2004 /  7.80 € - 51.09 ffr. / 381 pages
ISBN : 2-264-03840-3
FORMAT : 11x18 cm
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Pentecost Alley est certainement l’un des romans policiers les plus réussis de la très britannique Anne Perry. Pour la vingt-troisième enquête de Charlotte et Thomas Pitt, parue en Angleterre en 1996, elle joue habilement sur une série d’aller-retours entre les rues sordides de Whitechapel et le Londres des beaux quartiers : deux mondes qui ne devraient pas se côtoyer et qui ne le font que par le goût prononcé de certains gentlemen pour la débauche. Et la fange n’est pas toujours là où on pourrait le croire...

Quand, deux ans après l’émoi suscité par les meurtres de Jack l’Éventreur, est trouvé le corps de la prostituée Ada McKinley dans la maison de passe de Whitechapel où elle exerçait son commerce, l’émoi est grand. Il ne s’agit pas du banal meurtre d’une prostituée, trop courant dans les bas-fonds : la victime a été torturée, aspergée d’eau et ce que l’on appellerait aujourd’hui la scène du crime semble avoir été l’objet d’une étrange mise en scène. Surtout, l’on y trouve l’étrange insigne d’une société secrète dissoute des années plus tôt, qui compromet le fils d’une des meilleures familles de la ville et de l’un des hommes d’affaire les plus impitoyables du pays. Or Ada était un peu trop maligne pour son bien... Thomas Pitt, récemment promu inspecteur, a pour habitude de ne pas se fier aux apparences mais aussi de ne pas se laisser intimider ni par un nom ni par une position sociale. Les choses se compliquent quand sa belle-soeur Émilie, qui souffre d’une existence trop facile, trop oisive et somme toute bien inutile, décide de se mêler de l’enquête par amitié pour la jeune soeur du principal suspect. Émilie n’hésite pas à fabriquer de fausses preuves et Charlotte, mise devant le fait accompli, n’a pas d’autre choix que de la couvrir. Tout conduit alors Thomas Pitt à faire arrêter le souteneur de la jeune victime, lequel est promptement condamné et pendu. L’affaire semble classée quand une nouvelle prostituée est assassinée selon le même modus operandi. Pitt aurait-il été à l’origine de l’exécution d’un innocent? Sa carrière et sa réputation sont en péril. C’est alors qu’il découvre qu’un crime analogue a été commis six ans plus tôt et que ce précédent lui a soigneusement été caché... Ces trois crimes auraint-ils été commis par le même homme ? Le dénouement tragique de cette sombre affaire est à la fois simple et ingénieux.

Entre les prostituées de Whitechapel et les jeunes oisifs du beau Londres, la sympathie de l’auteur va sans équivoque aux premières qui pour beaucoup doivent leur chute à la mort ou à la défection d’un époux et qui ont préféré cette vie à celle, harassante, des ouvrières de la révolution industrielle. La violence et le désespoir marquent la vie de Whitechapel. Anne Perry reprend ici l’un de ses thèmes favoris : le pharisianisme de l’Angleterre victorienne, en particulier dans le domaine des moeurs. La double morale, une pour les hommes et une pour les femmes, autorise les premiers à assouvir leurs pulsions auprès de prostituées auxquelles ils dénient toute reconnaissance comme êtres humains. Il y a évidemment pas mal de manichéisme dans les portraits que nous peint l'auteur mais bien des personnages au cours de l’intrigue se révèlent plus complexes qu’il n’y paraît. Un profond pessimisme marque ces romans policiers où même les caractères les plus sympathiques ne sortent jamais indemmes des soubressauts d’un système social perverti. Malgré tout, le couple Pitt est suffisament attachant pour que, de crime en crime, les lecteurs aspirent à le retrouver.


Claire Laux
( Mis en ligne le 30/07/2004 )
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