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Photobiographique...
Hitonari Tsuji   Objectif
10/18 - Domaine étranger 2004 /  6 € - 39.3 ffr. / 93 pages
ISBN : 2-264-04033-5
FORMAT : 11x18 cm

Titre original : Ai no Kumeni, traduit du japonais par Karine Chesneau.
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Objectif. Titre polysémique. On pense d’abord à l’impartialité d’un jugement, d’une action, puis au but qu’on se donne et aussi à la photographie. Ce roman inédit d’Hitonari Tsuji combine les trois : son héroïne expose, de la manière la plus neutre possible, ce qui a guidé sa vie depuis toujours, la photographie.

A l’origine de sa vocation artistique, son incapacité à regarder le monde et les autres en face. Elle a la phobie des autres, avoue-t-elle dès la première page. Une vraie tare dans ce monde moderne où le maître mot est la communication.
Dans son univers, la petite boite noire offerte par son père alors qu’elle était encore enfant et promise à une belle carrière d’autiste devient rapidement sa bouée de sauvetage et même une extension d’elle-même. Son viseur sert d’interface, de zone-tampon entre le monde et elle. Il la rassure, lui donne l’illusion de ne pas être celle qui regarde alors que c’est tout le contraire. Au final, il lui permet d’aimer la Vie même si elle n’en conserve que certaines parties, celles qu’elle accepte dans son cadrage.

Elle commence par immortaliser des natures mortes puis se tourne vers les vivants. Dès lors, masquée par son objectif, la confrontation avec l’autre, l’échange deviennent possible. Echange, peut être un bien grand mot même si photo et amour cohabitent souvent chez l’héroïne… Surtout des amourettes. Une fois, une véritable histoire.
Et c’est un retour sur cette histoire d’amour avec un écrivain, consommée et achevée, qui sert de fil rouge à ce petit roman fin au style dépouillé. C’est cet homme qui, la première fois, la force à se regarder. En inversant les rôles de modèle à modelé. En la prenant en photo, en la faisant poser, en la poussant à montrer ce qu’elle cherche chez les autres quand elle les prend : l’expression ultime et intime de leur soi profond, cette vulnérabilité temporaire saisie par le «clac» infinitésimal de l’appareil, ce narcissisme dévoilé d’être choisi pour modèle… Ainsi photographiée, elle se révèle à elle-même. Son visage, ses rides d’expression, les positions de ses bras, de son corps… autant de portes ouvertes vers son malaise originel qu’elle traîne comme un boulet encore aujourd’hui… autant de mises à nu déstabilisantes. Une deuxième naissance en quelque sorte. Peut-être la clé du bonheur qu’elle capte parfois chez ses «sujets»…

Au-delà de ses romances, Objectif propose une réflexion sur la place de l’image dans notre vie. Assurément, ce livre-là nous parle de temps, de mémoire. Et quoi de plus opportun, en effet, pour explorer ces concepts complexes, que la photographie, qui pourrait être à Barthes ce que la madeleine est à Proust. Qui ne s’est pas retrouvé nostalgique en compulsant de vieilles photos, se souvenant du contexte jusqu’au moindre détail et réalisant que ce temps est à jamais révolu ?
Fenêtre vers le passé, révélateur du présent, la photo est une bouleversante machine à voyager dans le continuum espace-temps… Face à ces pauses spatio-temporelles que permet la contemplation d’une photographie, des connexions conscientes ou inconscientes se créent. Ainsi en est-il de cette femme qui, en visitant l’exposition de la photographe, est troublée par une photo d’homme en laquelle elle voit son père, qu’elle n’a pourtant que très peu connu…

Hitonari Tsuji explore aussi la relation particulière qui se tisse entre le photographe, en quête de L’image, et le photographié, désireux d’être sublimé par le regard de l’artiste. Avec ce risque, pour le faiseur d’image, d’oublier l’homme derrière l’objet de la photo et de le transformer lui-même en objet photographique. Le fait que l’auteur, considéré comme l'un des leaders de la nouvelle génération d’écrivains japonais, soit lui-même photographe n’est probablement pas étranger à cette méditation et le «je» de la narratrice n’en apparaît que plus autobiographique...


Sonia Arfaoui
( Mis en ligne le 14/01/2005 )
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