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Everywhere I look I see your eyes...
Amanda Sthers   Keith me
Le Livre de Poche 2008 /  5.50 € - 36.03 ffr. / 128 pages
ISBN : 978-2-253-12787-1
FORMAT : 11cm x 18cm

Première publication en mai 2008 (Stock)
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Keith me s'ouvre par une exergue que l'on est presque tenté d'appeler épitaphe, tant elle sonne étrangement lointaine et déjà mélancolique : «A Patrick, le papa de mes enfants qui reste pour toujours dans ma vie». La référence à Patrick Bruel doit bien entendu sa présence à la place qu'il a occupée dans la vie d'Amanda Sthers et non à un hypothétique lien avec le guitariste mythique des Rolling Stones, quelle que soit sa capacité à concurrencer «the biggest band», pour reprendre l'intitulé de leur dernier DVD, sur le terrain de l'adulation des foules (en France...) ; son ex-femme elle-même avoue ne pas aimer sa musique.

Il n'y a cependant rien d'anecdotiquement privé dans cette adresse, puisque l'écrivain qui s'exprime ainsi explicite en réalité l'état d'esprit de la narratrice. En effet, le roman, consacré à Keith Richards, est une autobiographie à plus d'un degré : «Je» est Keith, mais aussi Andréa, double très transparent d'Amanda, et les deux vies se mêlent sans délimitation. Entre histoire musicale et confessions sentimentales on pourrait croire la fiction réduite de fait à la portion congrue mais cela n'est pas tout à fait vrai.

Bien entendu, certains passages, comme celui de la découverte du riff de Satisfaction, rappellent plus qu'indirectement ce qu'on en sait déjà par divers textes journalistiques. Au fil de l'ouvrage sont retranscrites des interviews radiophoniques et des lettres de l'époque, certaines d'entre elles drôles, intéressantes du point de vue du fan des Rolling Stones, mais surtout révélatrices de ce que l'auteur voit derrière «ce visage étouffé de rides, criblé des chemins qu'il n'a pas choisis, des vies qu'il a prises dans le ventre».

A. Sthers se place à l'intérieur. Elle réinvente le caractère de Keith avec la légitimité de celle qui est lui : face à face au tout début et à la toute fin de Keith me, les deux personnages, narratrice et guitariste, ne font plus qu'un dans l'intervalle qui prend place entre les deux bornes du récit, sans doute plus irréelles que la fusion des individus elle-même. Cet intervalle s'étend le long de la vie de Keith, et le temps de la rupture, avant et après compris, d'Andréa. Le temps féminin est plus court, et se greffe sans bruit, sans frontière claire, à la fin des chapitres informels.

Vulnérabilité et orgueil, amertume et solitude, les deux histoires se conjuguent, la folie de la rockstar venant sans doute soulager, offrir d'une certaine façon un exutoire à la jeune femme blessée : la scène du voyage à Londres est très révélatrice, de ce point de vue-là. Prenant la forme du fantasme, le livre est pourtant empreint d'une compassion pour l'idole, de la part de l'admiratrice éperdue. Elle veut voir la fragilité là où les paillettes éblouissent, l'authenticité de l'humain là où les projecteurs créent des images de lumière.

Alors le personnage qui naît sous sa plume est parfois sombre, méchant, profondément égoïste ; mais jamais insensible. Son génie ne l'empêche pas d'être perdu, incapable de voir plus loin que l'échappatoire offerte par la drogue. Les cicatrices d'un passé familial douloureux et l'ombre envahissante de Mick Jagger planent sur la narration, comme la perspective d'un foyer désuni et la voix de Patrick Bruel, sans doute.

C'est dans l'ambiguïté permanente du sujet pensant, du sujet en proie à ses souvenirs qu'Amanda Sthers fait ici oeuvre d'art, dans la ressemblance proposée non comme parallèle, mais comme identité. Quoiqu'il ne s'agisse, quand on y réfléchit, que d'un exercice de style bien mené, porté par une plume sûre de soi, ce n'est pas la sensation que l'on retire de la lecture : le roman dégage une énergie rock'n'roll très rafraîchissante et une impression de sincérité indéniable, qui le rend tout à fait prenant et touchant.


Aurore Lesage
( Mis en ligne le 03/06/2010 )
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