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Poches -> Littérature |
| Laurent Gaudé La Porte des Enfers Actes Sud - Babel 2010 / 7,50 € - 49.13 ffr. / 266 pages ISBN : 978-2-7427-9114-9 FORMAT : 11cm x 18cm
Première publication en septembre 2008 (Actes Sud). Imprimer
Un père défie l´enfer pour en ramener son fils. Un fils venge son père en tuant son propre meurtrier
Il y a plus de vingt ans, les Scalfaro, Matteo et Giuliana, étaient ce jeune couple de Naples, un chauffeur de taxi et une femme de ménage, entourant de tout leur amour leur fils Filippo, Pippo. Jusqu´à cet instant T où les trois existences basculent : dans la guerre qu´ils se livrent avec la métropole sicilienne pour pré carré, deux clans mafieux ne voient pas qu´un enfant jouera le rôle de la victime ; une balle perdue, balle de trop, tue le petit garçon que son père traînait d´un pas pressé
Ici commence le mythe
La narration se tord et, vingt ans après, Filippo, homme robuste, cherche le tueur qui l´enleva à ses parents. Il le trouve et accomplit sa mission. Il est vivant, revenu des morts, on ne sait trop comment
L´auteur prend son temps, allant et venant d´une époque à l´autre, successives autant que parallèles, défi au temps. L´espace est le même, Naples l´obscure, cité confite de superstitions et de misère
Laurent Gaudé fait parler à travers cette paroi étrange, l´entre-deux-mondes, un père et son fils, figures tragiques. Matteo, comme sa femme, subit d´abord cette évidente déchéance, l´indicible abattement d´un père privé de son enfant. Giuliana sombre aussi mais finit par choisir la fuite, l´oubli. Avant l`exil, cependant, la Mater Dolorosa livre ses imprécations, intime à son époux de lui ramener son enfant, hante une église et son prêtre. Puis disparaît ; elle ne priera plus, même pas pour son fils
Matteo, désemparé, trouve en un étrange cénacle la réponse à son désarroi : une pute abîmée, un prêtre insolent, un professeur pédéraste et un barman doué comme nul autre dans la préparation des cafés
Ensemble, ils lui donnent le courage et la clé pour retrouver son fils défunt
L´auteur mène brillamment sa barque sur ce Styx littéraire, livrant une tragédie vrombissante, un conte dantesque, un mythe grimaçant devant la mort, véritable ode à l´amour filial, plus fort que les plus infrangibles frontières. On en sort à la fois abattu et ragaillardi, parce que l´histoire est belle autant que dure, lumineuse et accablante. Bref, sublime.
Bruno Portesi ( Mis en ligne le 21/06/2010 ) Imprimer
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