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Bande dessinée -> Manga |
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Quant le rat d’opéra devient rat de laboratoire… | | | Yu Aida Gunslinger girl (vol.6) Asuka - Seinen 2006 / 7,95 € - 52.07 ffr. / 208 pages ISBN : 2-84965-182-6 FORMAT : 12,7x18,2 cm Imprimer
Henrietta et Rico, deux adolescentes effrontées, sapprêtent à passer un séjour chez José et Jean en Sicile. Mais ce scénario idyllique cache une réalité bien plus troublante. Les deux fillettes font partie dun vaste programme de robotisation des êtres humains, qui ne connaîtraient alors plus le vieillissement, ni la peur. Une main duvre docile pour exécuter des basses besognes
La prochaine élue est une ballerine qui, suite à une amputation de jambe, a du mettre un terme à sa carrière.
Cette version futuriste de Frankenstein qui revisite à la sauce lolita le vieux phantasme du cyborg androïde sorte dhumain privé de ses prérogatives essentielles- met en scène avec beaucoup délégance et de raffinement lImmortalité et son pendant négatif, le Deuil. Issue dun eugénisme dune nouvelle trempe, flanqué des vilains des mots de « sélection », « instrumentalisation » et « aliénation », cette nuée de jeunes filles prépubères armées jusquaux dents donne froid dans le dos. Lesclavagisme post-moderne selon Yu Aida serait ainsi une réification organisée de lHomme qui, à grands coups de lavage de cerveau, se verrait privé de volonté propre et dautodéterminisme. Tout ceci évidemment pour la bonne cause : lutte contre le terrorisme, action pour la paix. À linstar du Meilleur des mondes dHuxley, les monstres sont ici en jupes plissées et de braves fillettes bien obéissantes grossissent les rangs dune inquiétante armée sans le moindre sens moral et à la botte de supérieurs peu scrupuleux.
Cet univers à lintensité dramatique poignante sorganise autour dun trait limpide et dun méticuleux travail sur les expressions et les attitudes des protagonistes. Aida ne recule pas devant sa tâche : décors époustouflants, costumes accomplis jusque dans le moindre détail, tout est fait pour capturer lattention du lecteur et le faire sombrer dans cet enfer hygiénique. Lauteur touche du doigt des sujets brûlants (enfants-soldats déshumanisés, femmes-objets asexuées, etc.) qui rappellent à chaque page toute la perversion et la laideur de lhumanité. Une misanthropie qui confère à la lucidité si lon se réfère aux articles de fin de volume où sont abordés les thèmes des snuffs movies et des enfants-soldats, réduisant à néant les ultimes illusions que lon pouvait se faire sur la nature humaine
Océane Brunet ( Mis en ligne le 14/11/2006 ) Imprimer | | |
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