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L’effet mère
Kim Dong-Hwa   Histoire couleur terre (vol.3)
Casterman - Ecritures 2007 /  15,95 € - 104.47 ffr. / 310 pages
ISBN : 978-2-203-39640-1
FORMAT : 17,5x24 cm
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Ihwa se retrouve bien seule après le départ de son amoureux, un fugitif en cavale. Elle lui a promis de l’attendre, contrition chargée de souffrance et d’incertitude. La jeune fille, comme par mimétisme, reproduit ainsi la même situation que celle que connaît sa mère, femme travailleuse qui vit dans l’espoir permanent du retour de son amant troubadour.

Réflexion pleine de sagesse sur l’amour et ses aléas, cette trilogie s’attarde sur les concessions insupportables avec lesquelles l’on doit parfois (sur)vivre. Les personnages féminins de Kim Dong-Hwa vivent dans l'expectative, mêlée d’une infrangible résignation. La mère, non sans un certain bon sens populaire, dépeint à sa fille le courage dont elle devra faire preuve face à l’adversité : « Sais-tu qu’il n’y a rien de plus douloureux que l’attente ? C’est une souffrance de tous les instants qui nous ronge de l’intérieur. Le moindre bruissement des feuilles mortes nous fait trembler d’espoir le plus fou. Crois-moi, ce n’est pas une vie ! ». Et Ihwa de répliquer avec détermination : « tant pis, j’en prends le risque ».

Cette belle et bouleversante leçon d’abnégation est sous-tendue par une vision un peu naïve de l’amour, éternel et plus fort que tout, mise en mot avec un langage très imagé pour circonscrire au plus près le sentiment amoureux. Mais cette approche n’est pas dénuée d’un traditionalisme quelque peu étouffant pour la femme, où le couple est sublimé de manière caricaturale : l’homme d’un côté, courageux et libre, voyageur impénitent, la femme de l’autre, réservée et patiente, qui attend sagement son retour au foyer, cantonnée à un rôle très contemplatif. Une répartition des tâches qui tient de plus en plus du folklore, Dieu merci ! Ainsi l’admiration sans borne que porte l’auteur au sexe faible semble-t-elle dissimuler quelque chose de moins glorieux. Car ce n’est rien moins qu’une forme de discrimination positive vis-à-vis des femmes qu’opère Dong-Hwa dans son œuvre en leur allouant toutes les qualités du monde, dont les bénéfices secondaires semblent évidents pour le mangaka : l’image d’un poète qui vénère la gente féminine tout en la comprenant, doux rêveur pacifique et tendre séducteur.

Le trait délicat et épuré, qui évoque l’art raffiné de l’estampe, entérine la nonchalance de l’histoire. Entrecoupés de silences apaisants, les épisodes se calquent sur le rythme indolent de la nature, avec un parallèle bucolique entre l’amour et le cycle des saisons. Histoire couleur terre offre d’ailleurs une approche contrastée de ce sentiment, dont deux aspects complémentaires très forts sont mis en exergue : l’un romantique, avec l’image d’Épinal de deux cœurs battant à l’unisson, l’autre plus frustre, fait de désirs charnels et de rêveries salaces. Le texte devient alors gentiment polisson, imprégné d’un érotisme éthéré qui interrompt l’épais ennui des deux femmes.

Car Histoire couleur terre, c’est aussi l’aventure d’une petite fille qui devient grande, chrysalide fragile qui s’ouvre à la vie et finit par prendre son envol. L’enseignement éclairé de sa mère, la transmission de gestes séculaires et d’un savoir-faire ancestral sont autant de moments de grande complicité entre les deux femmes. Même si Ihwa se rebelle parfois contre le statut étriqué à la poésie surannée que veut lui imposer sa mère, en se moquant des vieux adages de cette dernière. Ainsi, sachez mesdames pour votre gouverne que « ce sont les bons petits plats qui retiennent les maris » et qu’ « une femme qui fait bruyamment la vaisselle est aussi raillée que si elle grince des dents en dormant ».

Quant à la femme idéale, à mille lieues de la poupée Barbie, elle doit avoir « les lèvres, la taille et les chevilles fines, les bras, les fesses et les cuisses charnues, les tétons, le nez et la tête minuscules », réalisant ainsi une sorte de monstre tout droit sorti du cirque Barnum. Bref, l’œuvre n’est pas vraiment à la pointe des canons de beauté actuels et s’attache plutôt à retranscrire dans des paysages ruraux idylliques une culture passéiste aux valeurs démodées, mais riche en coutumes pittoresques. La cérémonie du mariage ouvre ainsi les portes d’un monde superstitieux où le symbolisme a une place prépondérante. Le tout imprégné d’une nostalgie polie face à la brièveté de la vie et à la rapidité du temps qui passe.


Océane Brunet
( Mis en ligne le 06/05/2007 )
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