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Bande dessinée -> Réaliste |
| Seth Le commis voyageur (tome 1) Casterman - Ecritures 2003 / 12.50 € - 81.88 ffr. / 144 pages ISBN : 2-203-39602-4 FORMAT : 17 x 24 cm Imprimer
On ne simprovise pas représentant de commerce. Simon Matchcard va en faire la triste expérience dans la deuxième partie de cet album. Timide et renfermé, Simon na rien dun vendeur, au grand désarroi de son frère Abraham. Simon est un poète, un collectionneur, il naime pas la ville et préfère les arbres, et le simple fait de commander un plat au restaurant relève pour lui de lexploit. Débarqué dans cette petite ville du Canada en 1957, Simon va devoir effectuer sa première mission en tant que commis voyageur, mais il ira déchec en déconfiture totale sans avoir pu vendre un seul de ses fameux ventilateurs Clyde.
Après les très remarqués Palooka Ville et La vie est belle malgré tout, Seth revient avec cette nouvelle série racontant la petite histoire de cette entreprise familiale, Clyde Fans.
La particularité de ce premier tome, cest sa structure audacieuse : deux chapitres que cinquante années séparent dans la fiction. Pas de flash-back, ni dimbrication compliquée, Seth distingue les choses et prend le risque de faire cette singulière première partie : Abraham " Abe " Matchcard nous raconte lhistoire de Clyde Fans. Il nous parle de son père, des déboires de son frère Simon, des bienfaits de lobstination et de la vente en général. Tout cela sur près de soixante-dix planches. Un long monologue continu où la mise en scène et le découpage se devaient dêtre à la hauteur pour ne pas laisser le lecteur en rade. On suit ce vieil homme, de pièce en pièce, du café au bain, en passant par ce couloir où lampoule ne fonctionne plus très bien. Seth excelle dans cet art de montrer ces petites choses. Ses planches ultra découpées, aux inserts multiples, lui permettent den raconter beaucoup et de poser avec soin une ambiance empreinte de nostalgie et de tristesse. Ce découpage quasi cinématographique confère à lensemble un rythme sans temps mort et ce long préambule savère passionnant du début à la fin.
La suite nous présente donc Simon, forcément moins bavard que son frère, et ses déboires de vendeur. Lambiance reste toujours aussi morose et amère. Les nombreuses vignettes muettes se succèdent et donne une atmosphère toute particulière entre désenchantement et cauchemar éveillé. Seth multiplie les vues de diverses façades dimmeubles (le Chris Ware de Jimmy Corrigan nest pas loin
) pour former autour de Simon une ville-piège dont il aura bien du mal à se sortir. Le personnage de Simon, par sa maladresse et son incapacité maladive à saffirmer est évidemment très attachant. Ses échecs successifs le plongent petit à petit dans un état dépressif palpable et très bien rendu par Seth.
Depuis La vie est belle malgré tout, le style graphique de cet auteur canadien sest considérablement affirmé et affiné. Les personnages sont posés avec une belle élégance par un pinceau définitivement maîtrisé, et le soin apporté aux décors donne une épaisseur non négligeable à lintrigue. La bichromie bleue utilisée, peu commune et remarquablement appliquée donne à lensemble une signature singulière et bienvenue.
Ce premier tome confirme définitivement le talent de Seth ; à côté de Chris Ware, Chester Brown ou Daniel Clowes, il fait partie des figures importantes de la nouvelle bande dessinée nord-américaine. Pour toutes ces raisons, le second tome de cette série est attendu avec beaucoup dimpatience et intérêt.
Alexis Laballery ( Mis en ligne le 24/09/2003 ) Imprimer
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