| Hubert Kerascoët Beauté (tome 1) - Désirs exaucés Dupuis 2011 / 13.95 € - 91.37 ffr. / 48 pages ISBN : 978-2-8001-5023-9 FORMAT : 24x32 cm Imprimer
Cest lhistoire dune jeune fille assez moche, voire franchement laide
Son prénom importe peu puisque tout le monde lappelle Morue, délicate attention qui souligne, outre son aspect extérieur, lodeur quelle dégage du fait dun travail décailleuse de poissons. Certes, Morue est assez gentille, et elle aurait même un ami, Pierre
mais de galant, point. Bref, et vous laurez compris, Morue, laide et pauvre, nest pas la mieux armée pour la vie. Par contre, elle a un bon profil dhéroïne de conte de fées, ne manque quune de celles-là et un prince charmant. Et cest justement ce qui arrive : dans ce royaume de fantaisie, une fée, Mab, a été piégée dans le corps dun crapaud
Délivrée par le baiser de Morue, Mab exauce son rêve le plus cher, la beauté ! Enfin, « exauce » à moitié, car la fée, ne pouvant transformer luvre de la nature, lance un sort qui transforme le regard des hommes : Morue reste Morue, mais aux yeux du monde, elle sera la plus belle des femmes, digne dun prince, ou même dun roi, et dont les yeux suffisent à allumer des guerres
Le sage petit royaume va bientôt se transformer en un champ de bataille, autour de Morue, devenue Beauté. Et le roi lui-même se détourne de son devoir
Tout cela va mal se terminer !
Un conte de fée décalé : le pinceau de Kerascoët (Marie Pommepuy et Sébastien Cosset au civil), déjà remarqué par un passage sur Donjon crépuscule ainsi que pour la série Miss pas touche, sest demblée approprié lhistoire concoctée par Hubert, donnant à Morue et à son univers une touche particulière, qui rappelle le trait à la fois naïf et fin dun Hansi. Dans une ambiance dimages dEpinal, le conte de fée, à lancienne, glisse subtilement vers le drame contemporain : Morue est candide, les hommes sont tous attirés par la même chose, quand toutes les femmes sont jalouses. Les ressorts de luniverselle comédie humaine sont tendus : désir, tromperie, jalousie, manipulation, mensonge
le royaume du roi Maxence, qui avait conquis une paix habile grâce à un mariage, va bientôt basculer dans une guerre allumée par la gracieuse Beauté.
Le travail des couleurs, également du à Hubert, souligne encore le côté à la fois rétro, surréel et un peu hors du temps de ce conte. Une variation poétique et un brin cynique sur le genre, comme un bonbon à lenrobage délicieux mais qui se dévoile amer.
Gilles Ferragu ( Mis en ligne le 03/06/2011 ) Imprimer
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