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Bande dessinée -> Chroniques - Autobiographie |
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Ses problèmes avec les femmes | | | Joe Matt Le Pauvre Type Delcourt - Outsider 2008 / 16.50 € - 108.08 ffr. / 172 pages ISBN : 978-2-7560-1447-0 FORMAT : 16x23 cm Imprimer
Le Pauvre Type inaugure la nouvelle collection Outsider de chez Delcourt. Après sêtre attaqué au marché des mangas, des comics de super héros, de la « nouvelle nouvelle vague » francophone, cest donc du côté des indépendants américains que léditeur vient dénicher quelques pages. La collection Contrebande, qui publiait encore il y a quelques années Jason Lutes, Adrian Tomine ou Craig Thompson, et sétant désormais focalisé sur le marché du comics, il était temps de créer un nouvel espace. Vincent Bernière quitte le Seuil pour prendre la direction de cette collection qui sannonce passionnante et, tout simplement, se présente comme « la Pléiade de la bande dessinée américaine ». On nen attendait pas moins !
Cet album de Joe Matt est toutefois loin dêtre une découverte. Publié en 1997 chez Drawn & Quarterly, il est traduit en français en 2001 dans la défunte collection Tohu Bohu des Humanoïdes Associés. Cette nouvelle version conserve le visuel original, propose une nouvelle traduction (hasardeuse par moments
), et reprend le titre original. Peep Show étant le nom de la série 14 comics édités à ce jour depuis 1992 -, et The Poor Bastard compilant les six premiers numéros. Bref, nous voilà en terrain connu, comme si, avant de passer aux choses sérieuses, la collection soffrait dentrée un classique pour installer confortablement son catalogue.
Le pauvre type en question cest donc lauteur lui-même, Joe Matt, qui tout au long de ces planches se raconte, se plaint, se morfond. Son drame ? les femmes ! Il est obsédé par elles, jusquà sen rendre malade. Incapable davoir une relation normale, il gâche tout, joue le difficile, la victime puis le bourreau. Lorsque le récit commence, Joe est avec Trish, et lon sent déjà que leur couple bat de laile, comme vieux avant lâge. Lui pense à dautres filles, fantasme sur les copines de Trish, se sent perpétuellement insatisfait. Mais cela nest rien à côté de ce qui lattend lorsque, inévitablement, la jeune femme, lasse, le plaque
La suite des aventures de Joe, cest un mélange de personnages insolites, de relations foireuses, de scènes tragiquement absurdes, et de moments de loose totale
Joe ne récolte que ce quil sème, et cest avec une candeur désarmante quil sexprime sur ses propres échecs. Ainsi, en parlant dune jeune femme qui ne correspond pas à ses goûts habituels avec qui il entretient pourtant un début de relation: « Je fais des compromis en acceptant le fait quelle est rousse et quelle a des taches de rousseur. La moindre des choses ce serait quelle couche avec moi. » Voilà un éternel déçu, égocentrique et cyclothymique, imaginant la femme parfaite et inaccessible pour mieux fuir les autres
et se réfugier dans le porno. Un pauvre type quoi ! Avec un constant humour, pas dupe, Joe Matt livre ce qui serait son autoportrait, ne cachant rien de ses pires bassesses et livrant comme des gags ses pires défauts. On pense à Woody Allen et son personnage de dragueur pathétique, et à Robert Crumb bien sûr, qui avait montré le chemin, livrant ses névroses sur le papier avec enthousiasme et panache, ne cherchant pas à masquer ses défauts, en en faisant au contraire, comme Matt, le ressort premier de son comique.
Avec un dessin impeccable, à mi-chemin entre celui de ses deux compères Seth et Chester Brown - le pinceau épais et brillant du premier et la fausse désinvolture du second Joe Matt réalisait là un travail remarquable, contribuant, avec Le Playboy de Chester Brown ou le travail de Julie Doucet, à lancer toute une vague dautobiographies dessinées. Cest fait ici avec tellement de classe dans la médiocrité que lon ne peut quadorer ce pauvre type.
Alexis Laballery ( Mis en ligne le 15/10/2008 ) Imprimer | | |
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