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Bande dessinée  ->  Chroniques - Autobiographie  
 

Génération Franco
Jaime Martin   Les Guerres silencieuses
Dupuis - Aire Libre 2013 /  24 € - 157.2 ffr. / 152 pages
ISBN : 9782800153469
FORMAT : 24x31 cm
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L’auteur de bandes dessinées face à sa page blanche : un passage obligé, mais qui commence à durer pour le narrateur de cette histoire, coincé devant son écran. Alors rien de mieux qu’une escapade familiale, un bon repas et, par défi, un père qui se met à raconter l’ancien temps, celui de sa jeunesse, sous Franco, et de son service militaire, à Ifni, terre espagnole aux confins du Maroc, une terre convoitée, qui déclencha une guerre. Mais avant d’endosser l’uniforme, on suit le père de l’auteur, gamin, puis jeune homme, aux prises avec le monde des adultes, un monde clos. C’est le temps de la jeunesse. Une jeunesse où l’on se débrouille avec les moyens du bord dans une société qui n’est pas vraiment « de consommation ». Une jeunesse où la religion pèse à tout moment sur les vies comme sur les consciences, dès l’école, et où le mariage est autant un devoir qu’une fuite en avant. Et surtout, une jeunesse dans un pays qui vit ses propres guerres, en marge de l’histoire de l’Europe. Arrivé à Ifni pour son service militaire, le père du narrateur y fait son apprentissage du métier militaire, entre camaraderie et coups fourrés. Les copains, les bons plans, les petites arnaques des uns et des autres, les bagarres, les punitions, les sous-offs, hargneux et mesquins… une petite guerre dans la grande, celle de l’Ifni, que le jeune soldat ne perçoit qu’à travers la paranoïa de ses chefs. En gros, les épreuves diverses censées faire de vous un « homme » au sens où on l’entendait alors, afin de revenir dans la vie civile et être considéré comme adulte, digne de travailler, de se marier, de s’inscrire dans une nouvelle routine. Une jeunesse donc, dans une société imprégnée des valeurs de l’Espagne franquiste.

Et au-delà de ces souvenirs, c’est aussi l’histoire d’un dessinateur espagnol contemporain, le fils d’une Espagne démocratique et en crise, qui entame un dialogue avec son père et sa mère, et qui découvre aussi un peu sa préhistoire, son grand-père. Un dialogue pour saisir le fossé qui peut les séparer, et dresser un pont.

L’album est émouvant, comme tous les dialogues entre générations : un père, militant de gauche, qui évoque une jeunesse rude mais éclairée par quelques belles anecdotes, et qui finalement, en garde une certaine nostalgie, et un fils qui, par touches, nous ramène à l’Espagne actuelle, celle des boulots précaires, de la crise et peut être d’un « bon vieux temps ». Le franquisme n’apparaît qu’à la marge, dans l’évocation militaire ou dans la rencontre avec deux aumôniers suspicieux : le reste s’apparente plutôt à une initiation à la vie d’adulte, ponctuée – comme l’avait fait Emmanuel Guibert dans Le Photographe, de photographies familiales, une manière de donner à ces souvenirs une légitimité autre que celle du dessin . Et la guerre, là-dedans ? Elle est à sa place, marginale, étouffée : une Drôle de guerre à la mode espagnole, presque un élément du décor. Mais quel décor ! Cette évocation des « gaietés et des misères » de l’escadron confère à ces Guerres silencieuses une ambiance particulière, comme un passé proche et révolu. Le graphisme de Jaime Martin, à la fois sobre dans ses effets, mais très attentif aux visages, aux attitudes, donne véritablement corps à ce récit. Pas de grands effets, un réalisme léger qui se passe de détails, tout est dans l’épure, jusqu’aux émotions : le sentiment dissimulé par une bravade, à fleur de peau, on ressent les sentiments du narrateur, qui continue, en petit mâle, à préserver sa pudeur… un joli tour de force pour un auteur qui mérite plus que le détour. L’album plaira à tous les amateurs d’histoire, militaire et autre, comme une belle évocation de la jeunesse et de l’odyssée, qui mène un gamin jusqu’au monde des adultes. Une belle surprise de la rentrée.


Gilles Ferragu
( Mis en ligne le 14/09/2013 )
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