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| Bande dessinée -> Les grands classiques |
| H.M. Bateman Mimodrames
Actes Sud - l'An 2 2012 / 23 € - 150.65 ffr. / 120 pages
ISBN : 978-2-3300-0506-1
FORMAT : 20,5x28 cm
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Encore méconnu en France, Bateman est un des grands caricaturistes anglais du vingtième siècle. Fameux pour ses grands dessins d'humour en couleur, et en particulier pour sa série The Man Who..., il est aussi l'auteur de nombreuses histoires de bande dessinée. En effet, à partir de la première guerre mondiale et jusqu'en 1933, il a publié régulièrement de brillantes pages comiques muettes. Les librairies françaises peuvent enfin l'accueillir, quarante ans après sa mort, grâce à une remarquable anthologie de ses travaux.
Les histoires muettes, on le sait, ont une longue histoire en bandes dessinées. Mais si la forme n'est pas nouvelle, reprise directement de Caran d'Ache, que Bateman reconnaissait pour modèle, les dessins, eux, éclatent d'une énergie nouvelle. À la caricature des corps, déjà très présente dans les dessins d'humour du début du siècle, Bateman associe des visages formidables, des expressions dynamiques et fortes, dignes des plus grands. Les yeux sortent des orbites, les bouches s'ouvrent en grand, les cheveux s'envolent dans le mouvement et les plis et les muscles s'associent pour renforcer les mimiques du drame. Caran d'Ache est taillé à l'os, purifié de ses scories anciennes. Restent des gestes d'une superbe dynamique. Jacovitti ou Edika sont beaucoup moins loin que la chronologie ne le laisserait penser.
Côté scénario, c'est le même émerveillement. Certaines histoires sont ancrées dans leur temps, comme Démarrage à la manivelle. D'autres n'ont pas pris une ride, comme Il refusait de lire le livre à la mode. Toutes sont riches d'une tendre ironie. Bateman croque avec affection les manies du quotidien, puis en tire les fils jusqu'à faire exploser la situation au-delà de toute limite. Un plombier vient réparer une fuite? Il inondera la maison. Un joueur de billard hésite sur la position des boules? La salle finira en miettes.
C'est luvre d'un pessimiste mais aussi d'un observateur, toujours à la recherche du drame en puissance derrière chaque banalité. Certain sans doute aussi du dérisoire de son propre travail. Bateman se voulait peintre plutôt que dessinateur, et finira par se consacrer entièrement à la toile. On le sent critique à l'égard du cubisme et de la modernité, mais c'est en remettant en cause les traditions et ses propres habitudes qu'il a trouvé le ton qui lui est propre. Tout en sachant que les Variations sur un thème sont la route de la gloire (lui-même y étant parvenu avec sa série The Man Who...) il ne se prive pas de jouer avec ses lecteurs. Là, quatre pages sont consacrées à la lente et tranquille journée d'un musicien qui ne joue qu'une seule note dans un concert. Ailleurs, il représente littéralement un homme qui se consume. Derrière la linéarité de son travail sur deux décennies, il explore les pistes de l'expressivité des hommes et des dessins.
Clément Lemoine
( Mis en ligne le 15/05/2012 )
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