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Siège
Pierre Vallaud   L'Etau - Le siège de Leningrad - juin 1941-janvier 1944
Hachette - Pluriel 2013 /  9 € - 58.95 ffr. / 382 pages
ISBN : 978-2-8185-0317-1
FORMAT : 11,0 cm × 17,8 cm

Première publication en mai 2011 (Fayard)

L'auteur du compte rendu : Gilles Ferragu est maître de conférences en histoire contemporaine à l’université Paris X – Nanterre et à l’IEP de Paris.

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Dans la guerre contemporaine, le siège – et la méthodologie qui s’y attache, la poliorcétique – sont des pratiques qui semblent oubliées : la fin des murailles urbaines, rendues obsolètes par le développement de l’artillerie puis des bombardiers, et surtout les transformations de la guerre moderne, guerre de masse, qui abolit les frontières traditionnelles du combat (front/arrière, civil/militaire), ont donné naissance à une guerre nouvelle, la guerre totale…

Face à ce type de guerre, l’exode – comme les Français et les Belges en 1940 – semble la solution la plus évidente, et personne ne songerait à s’enfermer dans une cité pour résister à un assaut. Sauf si le choix n’existe pas : c’est le cas de Leningrad, siège majeur de la Seconde Guerre mondiale, à peine moins marquant que Stalingrad et Sébastopol. L’étau du titre est donc double : c’est déjà la double pression – allemande et finlandaise – qui s’exerce sur Leningrad, ville à la fois stratégique et symbolique, durant plus de 900 jours (juin 1941- janvier 1944), ce qui en fait l’un des sièges les plus longs et les plus éprouvants de la guerre. On parlera également d’un étau idéologique, pour une population coincée entre sa survie et les options stratégiques du parti communiste (voire Staline), représentée sur place par Jdanov.

L’ouvrage démarre avec le pacte Molotov-Ribbentrop et l’invasion soviétique des Etats Baltes, ainsi que de la Finlande… Une paix précaire, qui laisse de forts traumatismes chez les envahis (lesquels trouveront dans l’invasion allemande un motif de vengeance) ; une paix bientôt fragilisée par les projets hitlériens. Mais tandis que les Allemands orientent habilement leur dispositif militaire vers l’Est, pour se placer en état de marche, l’URSS – par refus de considérer la réalité (et pourtant, Churchill n’a cessé de prévenir Staline) et l’échec de sa diplomatie ? – ne renforce pas son dispositif de défense. Aussi les premiers temps de l’invasion, bien évoqués par l’auteur, sont-ils décisifs, face à une armée rouge qui, à quelques exceptions près (les chars KV 1 et 2, rares), n’est pas en mesure de freiner le cours de l’invasion. Reste à mettre Leningrad en défense : encore une fois, l’Etat semble ne pas vouloir voir la réalité et se contenter de chiffres – impressionnants - de population mobilisée… Mais il s'agit de «volontaires» peu armés, sans instruction militaire… et débauchés de leur travail tout autant important pour l’effort de guerre. Alors certes, la ville se prépare, évacue ses enfants, installe ses vigiles, cache ses trésors (l’Ermitage quand même !)… mais rien ne prépare à la faim dévorante, aux bombardements, à l’hécatombe, ni à la folie des purges finales.

Entre-temps, une pression militaire qui ne se relâche pas, tant sur la ville, bombardée avec précision, que sur ses défenses (à commencer par Cronstadt, port à la fois stratégique – le dernier refuge de la marine soviétique – et symbolique - point de départ de la Révolution de 1917… Si l’assaut est largement mené par les Allemands (les Finlandais de Mannerheim se contentant de récupérer leur frontière), la résistance des Soviétiques est efficace : certes, le cercle des redoutes (ligne Staline, Novgorod, Vyborg, Schlüsselburg…) s’effondre peu à peu, mais on est loin des six semaines de combat prévues par l’Allemagne pour envahir la Russie. Côté allemand, on retrouve les réflexes d’un siège : encerclement, coupure des voies d’approvisionnement, bombardement intensif et guerre au moral. Côté soviétique, il s’agit de dégager peu à peu la ville, ouvrir une voie de ravitaillement. Des deux côtés, les enjeux politiques et idéologiques affleurent, ce qui donne à la propagande une dimension importante (la mise en scène des as et autres snipers est particulièrement soignée). Et dans ce maelström, la survie devient l’enjeu majeur, qui inspire à l’auteur, frappé par cet «esprit de survie» des assiégés, quelques scènes dantesques.

Après la publication des souvenirs d’Alexander Werth sur le siège (Leningrad 1943), c’est un historien, Pierre Vallaud, professeur à l’université Saint-Joseph et directeur du CERGES (Centre d'études et de recherche géostratégique), qui revient sur cet épisode majeur de la guerre. A mi-chemin entre l’étude historique et le récit, l’auteur use d’une écriture empathique, qui part des réflexions ou des souvenirs d’un anonyme pour aboutir, par jeux d’échelles, à la situation stratégique vue de haut… Une écriture claire, qui ne néglige pas les détails techniques, ou les digressions cultivées, sans toutefois s’empêtrer dans l’érudition pointilliste. On passe d’un camp à l’autre, des civils aux militaires, sans omettre quelques anecdotes singulières. L’ouvrage, qui dispose en outre d’un appareil cartographique bien pratique, ainsi que d’une chronologie annexe, se lit donc facilement, mélangeant le récit de siège à l’histoire militaire.

A destiner aux amateurs d’étude sur la guerre à l’Est, en attendant d’autres tableau de sièges…


Gilles Ferragu
( Mis en ligne le 26/03/2013 )
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