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Ils étaient quinze sur le coffre du mort…
Michel Le Bris   Pirates et flibustiers des Caraïbes
éditions Hoëbeke 2001 /  34.81 € - 228.01 ffr. / 215 pages
ISBN : 2842301218

Catalogue de l’exposition réalisé sous la direction de Michel Le Bris et Virginie Serna
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Quel enfant n’a jamais rêvé de répondre à l’appel du large, aux promesses d’aventure, de liberté et de richesses qui soufflent de l’épopée pirate telle qu’elle est parvenue jusqu’à nous par les romans, celui de Stevenson en premier, relayés par le cinéma et la bande dessinée ? Sans doute est-ce en partie une nostalgie de ses rêves d’enfant prolongée dans ses écrits qui a poussé Michel Le Bris, écrivain et directeur général du Centre culturel de l’Abbaye de Daoulas, à consacrer l’exposition annuelle aux Frères de la Côte. Après des expositions aussi diverses que L’œuf, nature et symbole (1990), L’Égypte au temps des pharaons (1991), Bretagne d’or et d’argent, les orfèvres de Basse-Bretagne (1994) et plusieurs sur la Chine (1992, 1993, 1997), les visiteurs de cette abbaye médiévale (XIIe siècle) du Finistère, en grande partie détruite et sécularisée, ont pu découvrir du 3 mai au 4 novembre 2001 au travers de l’exposition Pirates et flibustiers des Caraïbes, le monde picaresque et rude des pirates des Caraïbes, avant qu’elle ne parte s’installer au Musée national de la Marine au Palais de Chaillot, de mi-janvier à mi-mai 2002.

Partant des grandes découvertes et de la conquête espagnole, l’exposition Pirates et flibustiers des Caraïbes explique dans un premier temps les causes politiques, religieuses et sociales qui ont conduit aux pillages des navires espagnols isolés, puis à l’attaque des convois bi-annuels et des ports des Caraïbes par des aventuriers indépendants (pirates ou flibustiers) ou financés par une nation ennemie (corsaires). Si au XVIe siècle, les faits d’armes les plus illustres sont le fruit de corsaires en lutte contre la prépondérance espagnole en Europe, qu’il s’agissent des Anglais, Hawkins ou Drake, des Gueux de la mer des jeunes Provinces Unies, ou de protestants français, ils appartiennent tout autant, à compter du XVIIe siècle, siècle d’or de la flibuste, à des aventuriers pour lesquelles la souveraineté ou la religion de la victime n’exercent plus qu’une influence toute relative. L’activité de ces hommes, Anglais, pour les plus fameux, comme Morgan, Edward Teach dit Barbe Noire ou le Captain Kidd, Français, comme Nau L’Olonnois, ou Hollandais comme Piet Heyn, se prolongent jusqu’au XVIIIe siècle.

Ce n’est cependant pas seulement sur les multiples crimes de toutes natures commis par les pirates que s’attarde l’exposition de l’Abbaye de Daoulas mais aussi sur leur vie quotidienne, depuis leurs armes, leurs drapeaux et leurs navires jusqu’à leur cuisine dont un prêtre, français comme de juste, publie les recettes pour le moins exotiques en 1732. Entre le sabre et le boucan, le gril de bois vert où se fume la viande qui donne son nom aux boucaniers, s’impose aussi l’organisation de ces parias de la société moderne qui constituent dans les Antilles ou à Madagascar – manifestation de l’ouverture du monde et de l’ampleur du phénomène pirate – des sociétés égalitaires aux pratiques révolutionnaires pour l’époque comme l’élection du capitaine, le partage égal du butin et l’attribution d’indemnités aux invalides. Ces sociétés, celle de l’île de la Tortue ou la Libertalia malgache, marquent l’apparition d’une utopie de la flibuste révoltée contre l’ordre de son temps. Elles marquent aussi le début de la fin d’une aventure sous la pression de plus en plus forte exercée à l’encontre des pirates par les flottes de guerre des marines européennes, Royal Navy en tête, soucieuses de préserver leurs richesses, leurs commerces navals et l’ordre qu’elles représentent.
Dernière étape de l’exposition, l’élévation du pirate comme modèle de l’aventurier, au mépris de ses crimes les plus atroces, est envisagée sous les angles de la littérature et des illustrations qui ont relayé l’utopie pirate deux siècles après sa disparition des Caraïbes. Ce succès de la piraterie s’explique aisément par le rêve d’aventures et de liberté qu’elle représente mais aussi par la fascination morbide envers la cruauté d’un Captain Kidd ou par les fantasmes entretenus sur les femmes pirates, Anne Bonny et Mary Read en tête. Les artistes subissent largement cet engouement, depuis Daniel Defoe, auteur d’une Histoire générale des plus fameux pirates, jusqu’à Hollywood et ses pirates, modèles d’héroïsme ou de cynisme, incarnés par Douglas Fairbanks, Errol Flynn, Charles Laughton ou Burt Lancaster, en passant par Eugène Delacroix qui peint La Liberté guidant le peuple (1831) en s’inspirant d’une gravure représentant Anne Bonny en une tenue similaire et brandissant un drapeau noir à tête de mort ou les illustrations des livres pour les enfants et des hebdomadaires issues des œuvres de l’américain Howard Pyle (1853-1911) et de ses disciples.

Aucune perspective n’est donc négligée et l’exposition offre une perception générale d’un phénomène historique et de ses prolongements sans jamais sombrer dans le pointillisme. Pour cela, cette vue d’ensemble s’appuie sur de multiples ressources tant iconographiques, portulans, cartes marines, tableaux, gravures ou affiches de cinéma, qu’instrumentales comme les sabres d’abordage, sans lesquels on ne s’imagine pas un pirate, les tromblons, les maquettes de bateaux et même les instruments chirurgicaux. Cette réunion d’objets n’eut pas été possible sans la collaboration de musées et centres d’archives français, comme le Musée national de la Marine, Paris, la Bibliothèque nationale ou le Service historique de la Marine à Vincennes, ou étrangers, tels que le National Maritime Museum britannique, le i>Delaware Art Museum américain, ou le musée des Amériques de Madrid et bien d’autres encore.

Si l’on considère le catalogue, le résultat confond et impressionne par la richesse de l’iconographie, la clarté des textes et leur pertinence qui enrichissent l’exposition en prolongeant l’analyse et la précision. A tel point qu’il peut faire figure d’ouvrage de référence sur le sujet. Il faut dire qu’il résulte de la collaboration de sommités internationales spécialistes du monde maritime de l’époque moderne. Sans pouvoir tous les citer, il convient de mentionner les historiens et écrivains renommés qui ont contribué à cet ouvrage, comme les universitaires français Martine Acerra, Paul Butel, Frank Lestringant et Michel Vergé-Franceschi, ou des intellectuels étrangers comme Olga Lopez, conservateur au Musée maritime de Barcelone, Marcus Rediker, de l’université de Pittsburgh, ou encore Manuel Lucena Salmoral de l’université d’Alcala. Sans départir de sa qualité de travail historique, le catalogue Pirates et flibustiers poursuit le rêve de l’aventure pirate.


Hugues Marsat
( Mis en ligne le 01/02/2002 )
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Ailleurs sur le web :
  • Tous les renseignements sur l'exposition Pirates ! sur le site du Musée de la Marine
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