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Montluçon ou le patrimoine invisible
Samuel Gibiat   Isabelle Michard   Montluçon : les hôtels nobles - XVe-XVIIIe siècles
Les Amis de Montluçon 2006 /  / 200 pages

L'auteur du compte rendu : archiviste-paléographe, docteur de l'université de Paris I-Sorbonne, conservateur en chef du patrimoine, Thierry Sarmant est adjoint au directeur du département des monnaies, médailles et antiques de la Bibliothèque nationale de France. Il a publié en dernier lieu : Les Demeures du Soleil : Louis XIV, Louvois et la surintendance des Bâtiments du roi (Champ Vallon, 2003).
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«La scène, pourrait-on commencer en plagiant Ubu-Roi, est à Montluçon, c’est-à-dire nulle part.» Cette modeste sous-préfecture de l’Allier ne passe en effet ni pour une capitale régionale, ni pour un grand centre économique, ni pour un haut lieu de la culture et du patrimoine. Le touriste ignore la ville. Les beautés du Bourbonnais, ce sont les ombrages de la forêt de Tronçais, les chefs-d’œuvre gothiques de Souvigny ou les splendeurs thermales de Vichy. Un guide comme le Michelin ne dit rien de Montluçon, qui incite le voyageur à s’y arrêter.

Cette médiocrité est de tout temps. Depuis le Moyen Age, Montluçon est un «centre administratif secondaire» : elle est le siège d’une châtellenie depuis le XIIIe siècle, d’un grenier à sel depuis 1583, d’une élection (circonscription fiscale) depuis 1587, d’une direction des aides et d’une subdélégation de l’intendance depuis Louis XIV. Sous l’Ancien Régime, dès qu’une famille de la ville s’élève tant soit peu dans la hiérarchie sociale, elle part pour la capitale de la province, Moulins, puis pour Paris, de sorte que rien ne vient secouer la torpeur montluçonnaise :

Montluçon, pays de cocagne,
Qui plus y dort, plus y gagne.
Celui qui dort jusqu’à midi
Gagne cinq sols et demi.

Dit une chanson du XVIe siècle...

Ces conditions expliquent que la ville n’ait jamais produit de monument public ou de demeure privée d’une qualité exceptionnelle. L’architecture de Montluçon, comme sa vie sociale, est restée «moyenne». Le tour de force de ce livre est de nous faire découvrir cette architecture moyenne, sans chercher à la faire passer pour ce qu’elle n’est pas, et de nous montrer en même temps qu’elle constitue un patrimoine historique et artistique au même titre que les créations de la «grande architecture».

Les maisons nobles de Montluçon témoignent de la vie de toute une France du Centre, à l’évolution lente, où les influences extérieures ne pénètrent que lentement. La ville conserve jusqu’à aujourd’hui son parcellaire médiéval, entre le château des ducs de Bourbon et l’enceinte héritée de la guerre de Cent Ans. Les maisons bâties pendant les trois derniers siècles de la monarchie gardent le plus souvent les traits de l’architecture civile du Moyen Age : le principal corps de bâtiment est sur rue ; le plan du logis est souvent en L, avec une tour d’escalier dans l’angle ; les façades ignorent la symétrie. Une seule maison reproduit les dispositions parisiennes de l’hôtel entre cour et jardin : l’hôtel Cluzel de La Chabrerie, dont le Second Empire a fait le siège de la sous-préfecture. Les auteurs ont recensé les maisons de Montluçon ayant appartenu à des familles nobles et donnent pour chacune une double notice historique et architecturale abondamment illustrée de plans, de documents d’archives et de photographies anciennes et modernes. Ils nous livrent cinquante-neuf de ces doubles notices précédées d’une étude de synthèse.

Jusqu’à une date récente, nul n’avait vu dans ces demeures une quelconque valeur artistique. En 1965 encore, la ville faisait démolir le «Château jaune», hôtel gothique qui abritait un musée archéologique (notice 53). Les photographies du premier XXe siècle nous présentent une cité aux façades grises ou noires. Mais les photographies récentes montrent tout autre chose : la pierre est décapée, l’enduit refait, les toitures restaurées ; des plantes grimpantes égaient les façades. Le patrimoine est devenu visible, ou plutôt le bâti est devenu patrimoine. L’œil voit des beautés que les regards de jadis ne percevaient pas ou percevaient différemment : les courbes d’un garde-corps, le pittoresque d’un mascaron, l’élégance d’un portail flamboyant, le contraste entre l’ocre des enduits, le vert de la vigne vierge et le blanc des persiennes… Montluçon : les hôtels nobles parle de la beauté de ces choses banales qui peuplent les rues et les ruelles «au cœur frais de la France».


Thierry Sarmant
( Mis en ligne le 28/02/2007 )
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