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Histoire & Sciences sociales -> Période Contemporaine |
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L'Europe, une vieille idée | | | Jacques-Alain de Sedouy Le Concert européen - Aux origines de l'Europe (1814-1914) Fayard 2009 / 27 € - 176.85 ffr. / 483 pages ISBN : 978-2-213-63437-1 FORMAT : 15,3cm x 23,5cm
L'auteur du compte rendu : Sacha Markovic est PRAG à lUFR dEtudes slaves du Centre Malesherbes Paris IV-Sorbonne. Imprimer
Après des années dunilatéralisme américain qui ont souligné lassourdissante absence de lEurope sur la scène internationale et dans un contexte de doute manifeste qui confine à la panne de lutopie européenne, louvrage de Jacques-Alain de Sédouy arrive à point nommé pour nous rappeler combien le chemin du «concert européen» fut long et accidenté. Il a en fait une double ambition : remonter à la source contemporaine de lidée européenne pour en dérouler avec un soin artisanal et une précision érudite la genèse dune sorte de «patriotisme européen», tout en profitant de ce périple en quête des origines pour affiner lhistorique de la notion parfois galvaudée, souvent réduite à une expression consacrée, de «concert européen».
Dune plume alerte et gourmande, lauteur nous explique que «les Européens ont conscience de leur singularité» au XIXe siècle. Le mot «Europe» se réfère alors à un système de relations propre aux Etats européens allant bien au-delà de la notion géographique. Catlereagh parle de commonwealth of Europe, Alexandre Ier de «grande alliance» des Etats européens, Metternich de «grand système pacifique de lEurope» et Wellington de «patrie européenne». Si on reconnaît couramment au XIXe siècle quil existe en Europe un ordre au-dessus des Etats, on éprouve quelques difficultés à le définir. Il nexiste ni gouvernement même informel ni «fédération européenne» même si lidée séduit les plus grands, de Bonaparte à Victor Hugo en passant par Napoléon III et Ernest Renan. A défaut dunion territoriale et politique instituée, les représentants des puissances prennent lhabitude de sasseoir autour dune table pour régler les problèmes du continent plutôt que de sen remettre à un dialogue bilatéral, de gouvernement à gouvernement, nécessairement plus laborieux et plus réducteur. Ainsi, lauteur nous explique quil sagit dabord dune méthode diplomatique nouvelle, née dune obligation de concertation rapide entre les puissances alliées contre Napoléon, au cours des dernières années de la guerre. Les multiples congrès, réunion solennelles et autres conférences viendront empiriquement enrichir et affiner la pratique.
Mais il nous révèle surtout comment le «concert européen» dépasse le cadre de la simple méthode éprouvée pour accéder à celui de «système de relations structuré» destiné à dépasser la «politique de cabinet», afin de mieux préserver léquilibre européen. Ce «juste équilibre de puissance» entre grands est toutefois mis à mal par la montée en puissance des nationalismes des «petits Européens», notamment dans les Balkans, et on peut regretter au passage que Jacques-Alain de Sédouy ne réponde pas vraiment aux doutes de Pierre Renouvin qui, dans son Histoire des relations internationales, considère que ce système na dautre but que de «confirmer la prépondérance des grandes puissances» et ne recèle en aucun cas une conception nouvelle des relations internationales. Le scepticisme de Jean-Baptiste Duroselle était encore plus incisif dans LIdée dEurope dans lHistoire, lorsquil y voyait «une sorte de délibération des grands pour imposer leur volonté aux petits, tout en essayant de satisfaire des ambitions particulières et rivales. [
] Son efficacité ne sest manifestée quaux dépens des faibles».
A défaut daffronter ces deux monstres sacrés, lauteur revendique courageusement une vision plus optimiste et plus généreuse du travail diplomatique de ces prédécesseurs européens. La véritable nouveauté de cet ouvrage réside peut-être dans ce regard décomplexé, plus indulgent mais aussi plus humble, porté par un diplomate français manifestement attaché aux principes des Lumières mais conscient des dangers et des limites de luniversalisme occidental. Les spécialistes apprécieront un minutieux travail de recherches archivistiques, émaillé de très nombreuses notes biographiques qui accordent à chaque élément de la chaîne décisionnelle limportance qui lui revient, alors que lamateur averti ne pourra quêtre séduit par le plaisir communicatif que prend lauteur à décrire le milieu très particulier de la diplomatie.
Sacha Markovic ( Mis en ligne le 10/11/2009 ) Imprimer | | |
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