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Histoire & Sciences sociales  ->  Période Contemporaine  
 

''Nigaud impérial'' ?
Juliette Glikman   Louis-Napoléon prisonnier - Du fort de Ham aux ors des Tuileries
Aubier - Historique 2011 /  24 € - 157.2 ffr. / 344 pages
ISBN : 978-2-7007-0404-4
FORMAT : 13,5cm x 22cm

L'auteur du compte rendu : Alexis Fourmont a étudié les sciences politiques des deux côtés du Rhin.
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"Hegel, a naguère écrit Marx, fait quelque part cette remarque que tous les grands événements et personnages historiques se répètent pour ainsi dire deux fois. Il a oublié d'ajouter : la première fois comme tragédie, la seconde fois comme farce. Caussidière pour Danton, Louis Blanc pour Robespierre, la Montagne de 1848 à 1851 pour la Montagne de 1793 à 1795, le neveu pour l'oncle. Et nous constatons la même caricature dans les circonstances où parut la deuxième édition du 18 Brumaire». La conquête du pouvoir n’a pourtant pas été de tout repos pour le neveu de l’Empereur, comme l’explique Juliette Glikman dans son brillant ouvrage Louis-Napoléon Prisonnier, Du fort de Ham aux ors des Tuileries.

Certes l’échec du Second Empire a été monumental, mais le régime ne laisse de susciter interrogations et débats dans la France contemporaine. Comme le rappelle J. Glikman dans ses propos liminaires, «depuis deux décennies, président de la Cour des comptes, garde des Sceaux, ministre de l’industrie ou président de l’Assemblée nationale ont témoigné de leur admiration pour un régime dont ils éclairent le dynamisme économique, l’impulsion réformatrice, le volontarisme social. Les louanges les plus extrêmes côtoient les attaques les plus vives contre un régime imposé par un coup d’Etat, abattu par une défaite militaire qui coûta au pays l’Alsace et la Moselle. (…) Le clivage politique est évident. A droite, précise finalement l’historienne, la légende dorée de l’empereur social ; à gauche, la légende noire du vaincu de Sedan». D’après l’historienne, le césarisme hante toujours la scène politique française. Il «demeure le fil rouge de la culture républicaine» à un tel point que «le resurgissement de cette hantise emporte le régime impérial dans le flot des polémiques actuelles. Entre réhabilitation outrancière et dénégation partisane, entre naissance de la France moderne et peuple muselé par son élu, un commun dénominateur émerge : premier président de la République et dernier empereur des Français, Napoléon III attise les passions».

Issu de l’union de Louis Bonaparte et d’Hortense de Beauharnais, Louis-Napoléon Bonaparte est à ce titre neveu d’empereur, petit-fils d’impératrice et fils de roi. Rien de moins. «Son ascendance le prédestine [donc] à régner. (…) Ni l’effondrement de l’Empire en 1815, ni l’errance en terre étrangère n’ont raison de la prédiction» de sa mère, laquelle était profondément convaincue qu’il occuperait un jour le trône impérial. Pourtant, de sa naissance en 1808 à son élection à la présidence de la IIe République en 1848, la route qui devait le mener au pouvoir fut semée d’obstacles majeurs et particulièrement sinueuse. A la suite des «Trois Glorieuses» de 1830, les Bourbons ont été chassés du pouvoir au profit des Orléans. A donc débuté la Monarchie de Juillet et personne n’imaginait alors un quelconque avenir à la dynastie déchue. «La mort du fils unique de Napoléon, l’Aiglon, en 1832, a étouffé les ultimes craintes d’une reviviscence impériale. Louis-Napoléon, entouré d’une cour de fidèles acharnés à lui plaire, est bien le seul à prophétiser la restauration napoléonienne comme inéluctable». Aussi se prépare-t-il à cet avènement en s’arrogeant d’abord le titre d’héritier, puis en distribuant généreusement des subsides à divers revues et agents.

Après avoir tenté de soulever les soldats à Strasbourg en 1836, il débarque à Boulogne quatre années plus tard. Avec une mince poignée de séides, aux cris de «Vive l’Empereur !», Louis-Napoléon essaie d’appeler une garnison à l’insurrection. L’échec est sans appel et paraît «sonner le glas de toute espérance. Humilié, renié par les siens, Louis-Napoléon est envoyé dans la citadelle de Ham, forteresse médiévale datant du XVe siècle, pour y être oublié». L’objectif du gouvernement était de murer «le nigaud impérial» dans l’oubli, de le jeter dans «les poubelles de l’histoire» pour reprendre le bon mot de K. Marx. Toutefois, c’était sans compter sur l’intelligence politique de Bonaparte. En effet, «le prisonnier use de la condamnations pour s’intégrer au paysage politique. Ham est réinventé en Sainte-Hélène-sur-Somme. Le calvaire de Napoléon Ier serait prolongé en terre française par le martyre de son neveu, qui acquiert l’auréole de prétendant à force de souffrances». L’expérience de la «prison en terre française» fait alors office de «voie d’accès au trône. (…) La plume du condamné s’enflamme contre le gouvernement et compatit à la misère ouvrière : le sort des déshérités comble les heures lugubres du prince captif». Les visiteurs de marque se pressent au cachot pour y converser avec Louis-Napoléon. «Les sombres corridors résonnent des noms d’Alexandre Dumas, George Sand, Louis Blanc, Béranger, Chateaubriand, Odilon Barrot… Députés, journalistes, industriels, scientifiques entreprennent le pèlerinage de Ham. Des réseaux se constituent, des carrières se fourbissent».

Peu à peu, l’opération de communication parvient à faire du futur Napoléon III le «héros de la cause populaire, le représentant des classes exclues du vote, le porte-parole des opprimés tenus dans l’ignorance et la misère». Il aurait promis qu’il ne sortirait de Ham «que pour aller aux Tuileries ou au cimetière». Le destin l’a mené aux ors des Tuileries, puisque deux ans après s’être évadé il devint président de la IIe République, qu’il saborde dès 1851... Lui aussi tenait à son 18 Brumaire.


Alexis Fourmont
( Mis en ligne le 26/04/2011 )
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