| Brenda Maddox Rosalind Franklin, la Dark Lady de l’ADN Editions des Femmes / Antoinette Fouque 2012 / 20 € - 131 ffr. / 344 pages ISBN : 978-2-7210-0618-9 FORMAT : 17,3 cm × 24,2 cm
Samia Touhami (Traducteur) Imprimer
Rosalind Elsie Franklin (1920-1958) est à lorigine dune des découvertes majeures du XXe : la structure à double hélice de l'ADN. De nos jours, si les domaines dapplications de lADN ne sont plus à démontrer (affaires criminelles, maladies génétiques, preuves de filiation, identification de victime, etc.) en revanche, lusurpation scientifique qui sest faite à son insu appartient à la face sombre des annales de la science. De plus en plus, des voix sélèvent pour dénoncer limposture, telle celle dAxel Kahn dans la revue Médecine-Sciences, et concourent à rétablir la vérité historique sur ses travaux. Cette biographie de Rosalind Franklin sinscrit dans ce courant.
Chronologiquement, avec rigueur et se référant également à sa correspondance privée (nombreux extraits), Brenda Maddox, restitue le portrait fidèle de cette brillante scientifique et démontre de quelle manière les imbrications socioculturelles vont gommer lempreinte de son travail acharné, jusquà effacer sa trace scientifique. Elle relate le parcours intime, familial et professionnel de Rosalind Franklin dont le lecteur découvre enfin le (vrai) tempérament et les contributions scientifiques. Hélas, ce travail sur la diffraction des rayons X la pénalisera doublement : les rayons ont un effet néfaste sur sa santé (décès prématuré par cancer à 37 ans) et ses premiers clichés de la structure ADN à double hélice, découverte révolutionnaire dans la compréhension de la vie, seront subtilisés par son collègue, Maurice Wilkins.
Toujours prompt à la caricaturer - la surnommant entre autre, la ''dark lady'' (femme sinistre) - Wilkins communique ces précieux clichés à un duo de chercheurs, James Watson et Francis Crick. Ces derniers prennent alors conscience quils sétaient fourvoyés sur un modèle de structure à triple hélices : ils semparent de ces résultats, sempressent de les publier dans la revue Nature du 25 avril 1953 et signent cette publication scientifique de leurs seuls noms omettant soigneusement de mentionner les résultats obtenus par Rosalind Franklin. Quatre ans après le décès de cette dernière, le trio Watson-Crick-Wilkins se verra attribuer le prix Nobel (1962). Pour seul mérite, James Watson sactive à lui construire une réputation de caractérielle, la traitant même de "virago".
Brenda Maddox, journaliste et critique littéraire aux New York Times, Washington Post, Times, etc.,
, a reçu de nombreux prix littéraires dont celui, en France, du Meilleur livre étranger pour Nora. La Vérité sur les rapports de Nora et de James Joyce (Ed. Albin Michel, 1990). On ne peut que remercier les éditions Des femmes-Antoinette Fouque davoir pris linitiative de la publier : par sa qualité, cette belle biographie réhabilite Rosalind Franklin en tant que femme et contribue pleinement à une prise de conscience collective de lexcellent niveau de sa recherche scientifique. Reste à concevoir la reconnaissance officielle de ses pairs car le prix Nobel qui, légitimement, aurait dû être attribué à Rosalind Franklin, ne peut pas lêtre à titre posthume. Et si lexception confirmait la règle ?...
Marie-Claude Bernard ( Mis en ligne le 11/09/2012 ) Imprimer | | |