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Histoire & Sciences sociales  ->  Période Contemporaine  
 

De la difficulté de s’organiser
Christophe Bourseiller   Histoire générale de l’ultra-gauche
Denoël - Impacts 2003 /  23 € - 150.65 ffr. / 546 pages
ISBN : 2207251632
FORMAT : 15 x 23 cm
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Se maintenir à gauche du communisme, une « maladie infantile », comme le jugera Lénine dans un célèbre pamphlet ? Peut-être… Toujours est-il que, peu après la prise du pouvoir des soviets en Russie, en 1920, apparaît une frange de penseurs souvent doublés d’activistes qui remettent en question l’autoritarisme du nouveau régime et en pressentent les futures dérives. Se méfiant des syndicats, ils préconisent plutôt la mise en œuvre de réels organes de décisions populaires, sous la forme de conseils ouvriers. Bourseiller retrace l’évolution des trois grandes orientations de l’ultra-gauche européenne.

Tout d’abord, la gauche germano-hollandaise, avec ses penseurs et ses martyrs. L’ouvrage remet notamment à l’honneur la figure du lucide Anton Pannekoek, théoricien incontournable du conseillisme et des périls du technologisme galopant, qui se retirera de l’action politique tout en restant un critique avisé du marxisme. Rosa Luxemburg connaîtra quant à elle un destin plus funeste et sera exécutée à l’issue de la révolution avortée du spartakisme.

En Italie, le bordiguisme (du nom de Bordiga) sera à l’origine de l’assimilation de la démocratie à un système totalitaire, jugée finalement aussi serve des intérêts capitalistes que le fascisme. Intransigeante, partisane d’un bolchevisme «invariant», la fraction bordiguiste sera exclue du Parti communiste en 1926 et se dispersera entre Bruxelles, Paris et New York.

En France enfin, la «gauche de la gauche» se montrera dès le début extrêmement disparate. Son originalité sera de fusionner avec la critique artiste des situationnistes. On sait quelle importance auront les coups d’éclat et les slogans de ce groupuscule extrêmement fermé sur la pensée de Mai 68. Dominés par l’imposante figure de Guy Debord, les «situs» entreront cependant dans une logique d’exclusion qui les mènera à l’extinction et que leur gourou s’appliquera d’ailleurs à lui-même, en se suicidant en 1994…

Suivre le fil des fractions, ruptures, scissions, disputes et nouvelles agglutinations de tous ces mouvements, relève du tour de force. Vouloir recenser les sigles cabalistiques ou appellations grandiloquentes dont certains se sont affublés (UPS, GIC, GAAR, Internationale Hallucinex, L’Abat-jour, Aux poubelles de la gloire, Groupe non-groupe…) friserait la compulsion. Bourseiller relève ce double défi sans trop sombrer dans le travers du catalogue pur et simple. On pourra lui reprocher un manque de profondeur en ce qui concerne l’exposé précis des théories politiques en jeu. Mais si, en soi, les idées des différentes tendances sont, à la base, communes (anti-autoritarisme, anti-syndicalisme, critique du totalitarisme et de la démocratie…), c’est leur mode organisationnel qui posera réellement problème. Nuancer les divergences entre un groupe de quelques adhérents (atteignant parfois difficilement la dizaine !) serait rendre compte de discussions picrocholines stériles et pesantes.

C’est d’ailleurs une des idées-forces de l’ultra-gauche qui signera en grande partie sa perte. Dans le droit fil de son anti-antifascisme originel, la critique radicale de la démocratie ira jusqu’aux noces avec le négationnisme. Sans apporter d’éléments nouveaux par rapport au travail de Valérie Igounet sur le sujet, Bourseiller rappelle les errances de La Vieille Taupe de Pierre Guillaume, libraire et éditeur à la pointe de la contestation gauchiste, qui deviendra par la suite un thuriféraire des thèses faurissoniennes.

L’ouvrage de Bourseiller est donc un bon outil de départ dans l’exploration d’une pensée de la gauche aussi originale et stimulante que désespérément inapte à se structurer et à articuler les faits à la pensée. Anton Pannekoek, Paul Mattick, Benjamin Péret, Guy Debord, Raoul Vaneigem, Cornélius Castoriadis, Daniel Guérin, René Riesel ; Spartakus, Socialisme ou Barbarie, l’Organisation communiste libertaire, Rouge et Noir, L’Encyclopédie des nuisances… Autant de figures, de groupuscules ou de revues qui constituèrent les laboratoires particulièrement remuants d’une gauche utopique. L’avenir nous dira si cette pensées peut connaître un quelconque renouveau. Bourseiller, quant à lui, est confiant…


Frédéric Saenen
( Mis en ligne le 05/03/2004 )
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