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Faits divers et histoire régionale
Gérard Justin   103, rue Royale - Les archives de la P.J. lilloise
Ravet-Anceau - Les coulisses de l'histoire régionale 2008 /  15 € - 98.25 ffr.
ISBN : 978-2-914657-68-6
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Le crime de Bruay-en-Artois (1972) tient désormais sa place dans la liste courte des grands faits divers français de dernier siècle aux côtés des affaires Landru, Petiot, Dominici, Marie Besnard et enfin celle du «petit Grégory». Leur point commun fut la forte médiatisation de l’enquête ou, le cas échéant, celle du procès d’assises. Certes, l’assassinat non résolu de la petite Brigitte Dewèvre n’est pas le sujet du livre du commissaire Justin, mais il y tient la place vedette.

Gérard Justin a commencé sa carrière à la police juste après 1968 et il est affecté dans le Nord, à la police judiciaire de Lille. D’enquêteur il devient un témoin privilégié de la «machinerie» policière. Mais, le tableau brossé est loin des images de nos actuelles séries télévisées. Le métier d’enquêteur, s’il n’en est plus à sa préhistoire, est encore un jeu de piste, un long parcours sur le terrain des crimes. C’est le premier mérite de ce petit livre que de souligner la rapidité des progrès considérables de la police scientifique et l’évolution du métier de policier enquêteur. Mais au détour d’une phrase et d’une statistique sur les crimes et délits, le commissaire Justin rappelle aussi combien la société française a changé depuis les derniers feux de l’expansion, attisés par mai 68.

Les douze affaires criminelles choisies, dont le déroulement est suivi avec le suspens requis, nous font redécouvrir, comme dans un bon Simenon, toute une société encore installée sur des certitudes, ses hiérarchies sociales mais aussi ses convictions idéologiques revues et corrigées par le mouvement de mai. Pourtant, les nuages s’amoncellent. Les mines se savent condamnées, et avec elles une région entière. Les chantiers navals de Dunkerque ne sont pas au meilleur de leur forme. La monde rural, en Artois, en Picardie, achève sa métamorphose et craint pour sa survie. Mais la crise n’est pas encore passée par-là. C’est donc tout un monde quasi disparu qui s’agite autour des meurtres, des enlèvements, et autres crimes qui constituent la chronique judiciaire et des faits divers du Nord dans la première moitié des années 70. C’était le temps des 4L de service et des R16 aux couleurs de radio Luxembourg et d’Europe n°1, des deux chaînes de TV (3 en 1973), d’un code de procédure pénal à peine retouché et de la peine capitale ; bref, les années Pompidou déjà si loin.

Lors de ses missions, la police judiciaire de Lille (sis au 103 de la rue Royale) rencontre l’agitation politique d’extrême gauche qui subsiste dans la traîne de 68. Un mouvement, hors des sentiers battus de la politique, inquiète particulièrement le ministère de l’Intérieur, celui de la Gauche prolétarienne. Il se caractérise par l’action violente et un travail plus ou moins clandestin dans les milieux ouvriers. La crainte d’un sabotage aux conséquences funestes ne laisse pas la police indifférente aux activités du mouvement maoïste qui est par ailleurs interdit depuis avril 1970. Les équipes de la P.J. lilloise auront à faire à plusieurs reprises aux militants de la «GP» notamment à Dunkerque où des incendies criminels sont signalés, mais également à Bruay où le mouvement gauchiste inaugure une nouvelle stratégie, celle de l’exploitation politique du fait divers comme instrument de la lutte des classes. L’affaire de Bruay-en-Artois sera d’ailleurs son chant du cygne. De tout cela, Gérard Justin rend compte avec précision.

Reste enfin les douze affaires criminelles recensées auxquelles l’officier de police a assisté entre 1969 et 1974 : des toutes premières prises de drogue à la frontières belge aux meurtres les plus sordides. Le hasard, les indics, la ténacité, font surgir la solution, démasquer le coupable, libérer une victime. Reste Bruay, l’enquête non résolue, sur laquelle, à l’évidence, le Commissaire Justin a une opinion, ou plus exactement un sentiment de perplexité né chez le jeune policier d’alors et qui s’est certainement renforcé. Enquête bâclée ? Pistes inexplorées ? Partis pris imprudents du juge Pascal et du commissaire de l’époque, sans doute. L’analyse reste mesurée, le récit prudent, mais on soupçonne l’auteur de n’en penser pas moins. Et que devient le meurtre de Cauchy à la Tour, également non élucidé par ce que l’on a détourné l’effort vers Bruay ? Y-a-t-il un lien entre les deux crimes ? Les meurtres de Myriam Wuillaume et de Brigitte Dewèvre sont prescrits depuis 2005…

Voilà un livre court – ce qui n’est pas un défaut -, informé, écrit avec talent, qui offre davantage qu’une chronique régionale. On aimerait en savoir plus ; patience, les archives judiciaires sont communicables au bout d’un siècle…


Pascal Cauchy
( Mis en ligne le 04/02/2009 )
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