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Dossier : GUERRE D'ALGÉRIE
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Chronologie de la Guerre d'Algérie

Un témoignage pudique et sensible
Aïssa Touati   Régis Guyotat   La Temesguida. Une enfance dans la guerre d’Algérie
Gallimard - Témoins 2013 /  21 € - 137.55 ffr. / 160 pages
ISBN : 978-2-07-014182-1
FORMAT : 15,2 cm × 22,2 cm

Pierre Guyotat (préface)
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Prête-moi ta plume. Cinquante-quatre ans après en avoir été chassé, Aïssa Touati revient sur son sol natal avec son fidèle ami, Régis Guyotat, auquel il confie le soin de transcrire son témoignage.

Ouled Seddik se situe sur le versant nord du massif de la Temesguida, à quelques mille mètres au-dessus de la Mitidja et une quarantaine de kilomètres d’Alger à vol d’oiseau. Torride en été, enneigé en hiver, ce hameau est à deux heures de marche de Tablat, ville la plus proche. Seules des populations très pauvres, évincées toujours plus loin des zones fertiles, ont dû s’accommoder autrefois de telles conditions. D’Ouled Seddik ne restent aujourd’hui que des ruines, après l’incendie perpétré par l’armée française en 1959 et les plaies de la guère civile de 1990. Aïssa Touati y est né en 1945 ; il y a grandi, heureux et libre malgré un total dénuement, parmi ses nombreux frères et sœurs, auprès d’une mère aimante, un père peu présent, en défendant leurs chèvres contre l’attaque des chacals. Telle fut son école à lui. Non loin de là, à mi-pente, face au mont Bou Djemel, sur le monument des martyrs est gravé le nom de son frère aîné, tombé en 1960 aux côtés des derniers combattants de son unité de l’Armée de Libération Nationale. Chassé de la montagne vers la plaine, de Rivet à Belcourt, le narrateur connaîtra avec sa famille d’autres formes de misère avant de découvrir à vingt-quatre ans celles de l’émigration.

En 1960, Pierre Guyotat est appelé du contingent en Algérie. Treize mille appelés de sa sorte sont morts, souligne-t-il dans sa préface peu amène à l’égard des autorités françaises. Témoin indigné des violences infligées aux populations durant cette guerre, il sera lourdement sanctionné, non seulement pour ses positions ouvertement antimilitaristes et anticolonialistes mais en raison de sa solidarité affichée envers le peuple algérien. Son œuvre littéraire porte les indélébiles traces de sa bouillonnante révolte. Adolescent durant cette période, son frère Régis, lui, ne prend pas encore conscience du drame qui se joue. Il lui faudra attendre ses voyages dans l’Algérie indépendante pour mesurer l’ampleur des cicatrices qu’il n’aura de cesse de dénoncer : à sa manière, au moyen de l’écriture journalistique et en même temps à travers des actes concrets destinés à restituer un espace de parole à ceux qui en ont été exclus. C’est lors d’un cours d’alphabétisation qu’il anime dans la France tout juste post soixante-huitarde que Régis Guyotat rencontre Aïssa ; les deux hommes poursuivront leurs échanges personnels et familiaux de part et d’autre de la Méditerranée et à plusieurs reprises reviendront ensemble sur les flancs de la Temesguida.

Grâce à l’écoute et à la plume de son ami, A. Touati reconstruit les nombreux fragments de sa mémoire tels que ceux-ci resurgissent, au fur et à mesure de son cheminement personnel. À l’occasion de ses voyages récents, il découvre de troublantes zones d’ombre mais n’étant ni historien ni policier, il laisse aux spécialistes le soin de les élucider ; la place qu’il s’octroie, parfaitement délimitée, est celle du témoin qui, de l’enfance à l’adolescence, a traversé dans son pays les années de guerre sans en saisir les enjeux : une expérience d’abord corporelle et intuitive, analysée avec beaucoup de finesse, dont le sens s’est peu à peu révélé à la lumière des épreuves suivantes. Ce n’est qu’adolescent, malingre mais déjà chargé de nombreuses missions, que celui-ci comprend l’engagement militant de son frère Ramdane, infiniment aimé et admiré, auquel il dédie aujourd’hui son livre en guise de sépulture.

Ce livre, il le dédie également à sa mère, figure à la fois réelle et emblématique dans sa lutte quotidienne pour un mieux vivre au moyen de multiples compétences auxquelles A. Touati rend hommage : cuisiner, chanter, tisser, fabriquer des poteries en échange de quelques vivres, n’ont pour elle aucun secret ; les scènes de veillée autour du feu, lors desquelles elle endort sa nichée en troquant la faim contre des histoires merveilleuses, relèvent d’une infinie poésie. L’un sur le dos, l’autre dans les bras, c’est elle qui sans relâche porte, réchauffe, soigne et lèche — serait-on tentés dire — ses petits, les rendant ainsi capables d’affronter les dangers de l’existence. Héroïne anonyme des grands changements sociétaux, c’est elle encore qui, à l’aide de Messaouda, l’aînée des filles, soutient et nourrit les défenseurs d’un monde libre, au risque de graves représailles.

Profondément touchant en raison de sa singularité et en même temps de son universalité, ce témoignage pudique et sensible désormais «gravé» sur le papier représente l’aboutissement des dialogues entre le narrateur et le scribe, et scelle leur amitié. Fruit de cette fraternelle aventure humaine, il autorise une pluralité de niveaux de lecture adaptés à tout public. Une réussite à saluer sans réserve.


Monika Boekholt
( Mis en ligne le 17/09/2013 )
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