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Le crépuscule d’une icône ?
Pierre Péan   Le Monde selon K.
Fayard 2009 /  19 € - 124.45 ffr. / 323 pages
ISBN : 978-2-213-64372-4
FORMAT : 13,5cm x 21,5cm

L'auteur du compte rendu : Romancier, essayiste, docteur en sociologie, Frédéric Delorca a publié entre autres, aux Éditions du Cygne, Transnistrie : Voyage officiel au pays des derniers Soviets (2009).
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Le docteur Bernard Kouchner, homme politique français, cofondateur de Médecins sans frontières et de Médecins du monde, héraut de l’ingérence humanitaire occidentale à travers le monde est une des icônes médiatiques de notre temps, dont les hagiographies s’étalent dans les encyclopédies et les grands journaux. Pourtant, depuis longtemps déjà, ses actions et son style suscitent de nombreuses critiques qui peinent à percer dans un débat démocratique largement verrouillé : le souvenir de son soutien tapageur à des agressions militaires meurtrières aux fondements légaux et idéologiques douteux (Serbie, Afghanistan, Irak, sans oublier son exhortation à se «préparer au pire» contre l’Iran), sa sympathie affichée, comme administrateur du Kosovo, pour la milice UCK quand celle-ci assassine et contraint à l’exil les minorités non-albanophones de cette province, ses arrangements avec la junte birmane, n’ont pas fini de laisser un goût amer, notamment dans le souvenirs des proches des victimes. Ministre aussi bien de François Mitterrand que de Nicolas Sarkozy, le docteur Kouchner a fini par incarner une forme de «prêt-à-penser» en matière de politique étrangère – l’homme «à la veste couleur pensée unique doublée à l’intérieur» sur lequel ironisait récemment Jean-Pierre Chevènement.

Dans Le Monde selon K., Pierre Péan, un journaliste de renom qui n’a pas hésité par le passé à enquêter sur des sujets délicats voire tabous, entreprend de démonter le «mythe Kouchner» et de montrer l’homme politique sous son vrai jour. Partant de sa première expérience au Biafra dans les fourgons de la Françafrique gaullienne, Péan dépeint le French doctor dans certains de ses principaux rôles, en Bosnie, au Rwanda, au Kosovo, en Palestine. A chaque fois c’est le même personnage : bouillant, culotté, avide d’attirer les caméras sur lui, ne s’embarrassant jamais d’analyses détaillées des situations. Le docteur Kouchner est un homme en phase avec la société de spectacle, un héros «à l’américaine» qui voit le monde en noir et blanc, croit que «l’hormone mâle gouverne monde» et préfère le God save the Queen à La Marseillaise. Son itinéraire politique qui démarre dans les rangs du parti communiste et finit dans les bras de George W. Bush est d’ailleurs peut-être symptomatique des erreurs et dérives de toute une génération – elle illustre en tout cas ce que la majorité de cette génération a pu tolérer, et même applaudir, ce qui peut-être signera son échec au yeux des générations futures.

Le dossier de Pierre Péan, qui se cale sur une grille de lecture inspirée d’Hubert Védrine et de Régis Debray, et prend à l’occasion, non sans raison, les accents du journal Le Plan B (quand il met en cause la célèbre épouse du ministre, Christine Ockrent), en apprendra beaucoup au lecteur aveuglé par un certain consensus médiatique. En revanche, pour le lecteur assidu des rares samizdats critiques de ce pays, son travail prendra plutôt les allures d’une compilation, d’un aide-mémoire. Mais qu’importe, il fallait le faire.

Une des étrangetés de l’année 2009 est l’accueil réservé à ce livre. Non pas tant l’accusation d’«antisémitisme» que lui a adressée M. Kouchner, et dont des gens comme Eric Zemmour ont eu le courage de dénoncer la gratuité et la mauvaise foi, mais le fait que de cet ouvrage la plupart des journaux n’ont retenu qu’un chapitre : le douzième, celui consacré aux contrats qui ont lié Bernard Kouchner à des présidents africains. Comme si le reste, tout le reste – l’amateurisme politique, le mépris pour les intérêts français, le soutien aux guerres impériales –, tous ces reproches très graves et très argumentés que M. Péan adresse à l’actuel ministre des affaires étrangères, ne comptait au fond pas et n’étaient pas dignes de débat. Ce biais dans la réception de ce livre en dit long sur la légèreté d’une époque et d’une classe politique dans lesquelles M. K. se sera mu comme un poisson dans l’eau…


Frédéric Delorca
( Mis en ligne le 06/04/2009 )
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