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| Pierre Achard Les Derniers jours du Rock'n'Roll Grasset 2008 / 21.90 € - 143.45 ffr. / 507 pages ISBN : 978-2-246-73461-1 FORMAT : 15,5cm x 23cm Imprimer
La liste est longue, des rockers décédés avant lâge de la tournée dadieux, passés directement de vie à légende. Ces Derniers jours du rocknroll constituent pour Pierre Achard loccasion dun hommage à nombre de ces musiciens qui ont marqué sa «génération» (chantée par les Who) et quelques autres ; comme il avait célébré les disparus du grand écran dans son premier livre, Boulevard des crépuscules.
Louvrage prend ainsi la forme dune succession dinstantanés qui permettent dévoquer la trajectoire brisée de célèbres chanteurs, guitaristes, voire batteurs ou bassistes, autour des derniers instants de leur existence. Lauteur ne ménage pas sa peine, se montre empathique et emphatique, enthousiaste, encyclopédique. Au premier abord, le résultat est agréable à feuilleter, comme un album sépia doù séchappent quelques touchantes images fanées.
Malheureusement, pour la musique du diable comme pour le reste, lenfer est pavé de bonnes intentions. Et la lecture devient vite décevante pour lamateur de rock, et même pour le simple lecteur exigeant ou seulement attentif. Pierre Achard fait partie de ces professionnels de la musique qui ne sont pas musiciens eux-mêmes ; et cède à un penchant répandu parmi ses semblables, où le bon ton remplace le bon goût. Il énumère ainsi une série dicônes quil est bienséant dapprécier quand on prétend connaître la musique, et quil est dautant plus facile de mythifier après une mort forcément tragique. Le poids de lévidence, la monumentalité des incontournables balaient toute sensibilité personnelle au profit de lémotion de commande.
Quoi de commun entre Buddy Holly, Bob Marley et Kurt Cobain ? Pas grand-chose, si ce nest une légende bien entretenue. Pierre Achard y ajoute sa pierre et astique son alignement durnes funéraires portant des noms entrés dans le langage commun, nettoyées de toute odeur de soufre par les coups de brosse successifs. Alternent ainsi les grandissimes vedettes, plus ou moins rocknroll dailleurs (Otis Redding), et des figures relativement mineures qui sont les marottes des bien-pensants de la musique (Nick Drake). En revanche, la marionnette punk Sid Vicious na droit quà quelques lignes, et les plus profondément dérangeants Klaus Nomi ou Ian Curtis sont survolés.
Louvrage a une qualité néanmoins, bien que très involontaire : la dimension légendaire de ces stars est paradoxalement minorée par lévocation qui en est faite. En effet, Pierre Achard leur attribue des pensées qui prêtent à sourire, leur assigne des intentions parfois bien pusillanimes, leur redonne malgré sa pompe une grande banalité humaine. Il se complaît à étaler leurs fêlures mais réduit finalement tous ces héros à un même modèle peu glorieux ; la rock-star semblant nexister quhébétée par la drogue et hantée par un «autre» indéfini et changeant selon les cas. Si lon ne discutera pas des choix artistiques, certains jugements moraux, voire moralisateurs, sont gênants. Enfin sajoutent quelques approximations quant au contexte historico-culturel (a-t-on réellement vu les beatniks pleurer en masse Kennedy ?).
Mieux vaut remettre un disque sur la platine, ce sera un bien plus bel hommage.
Marc Lucas ( Mis en ligne le 30/07/2008 ) Imprimer | | |
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