annonce rencontre site de rencontre rencontre femme rencontre blog
L'actualité du livre et du DVD Vendredi 22 octobre 2004
LE LIVRE
LE DVD
 
  ARCHIVES  /  PLAN DU SITE
LE LIVRE
Notre équipe
Littérature
Essais & documents
Philosophie
Histoire & sciences sociales
Beaux arts / Beaux livres
Bande dessinée
Jeunesse
Art de vivre
Poches
Sciences, écologie & Médecine
Sciences
Médecine & psychologie
Ecologie & nature
Rayon gay & lesbien
Sciences, écologie & Médecine  ->  Médecine & psychologie  
 

Le livre d'une vie...
Suzanne  Képès   Le corps libéré - Psychosomatique de la sexualité
La Découverte - Poche 2003 /  1.37 € -  9.00 ffr. / 260 pages
ISBN : 2707141046

L'auteur du compte-rendu : Antoine Bioy est psychologue clinicien et enseignant en psychologie.
Imprimer

L’auteur, Suzanne Képès, est de formation médicale. Sa clinique – elle fut d’abord médecin d’usine, puis gynécologue – l’a peu à peu conduite à s’interroger sur le lien entre soma et psyché. Progressivement, cette réflexion a orienté son parcours professionnel vers la psychothérapie, avec une pratique en relaxation. Actuellement médecin honoraire et ancienne directrice d’un enseignement autour de la sexualité humaine à l’université de Paris-XIII, Suzanne Képès propose dans cet essai une réflexion autour de la psychosomatique, nourrie de son parcours professionnel, riche en enseignements et en réflexions cliniques.

La psychosomatique est cette intuition clinique d’un lien entre soma (corps) et psyché (esprit). Intuition qui accompagne la médecine depuis de nombreux siècles, mais dont la nature et les mécanismes exacts restent à ce jour méconnus, voire inconnus. La psychosomatique constitue à ce titre un objet d’étude à la fois mystérieux et fascinant. Suzanne Képès y apporte un éclairage, celui de sa pratique. Sa formation (gynécologique) et son parcours (notamment en planning familial) lui offrent un angle d’étude tout trouvé, celui de la sexualité, retrouvant par là-même les racines de la théorie freudienne, qu’elle cite amplement.

L’ouvrage est avant tout le fruit d’années d’expérience, et tout naturellement l’auteur nous raconte son parcours, ses rencontres professionnelles, ce qui, chez ses patients, l’a émue et questionnée, théoriquement comme cliniquement. On remarque une certaine naïveté dans son écoute professionnelle, c’est-à-dire une capacité à redécouvrir et à repenser la théorie au travers de la parole de ses patients, et de ce qu’ils disent de leurs maux. Cette approche, qui rappelle fortement celle de Joyce Mc Dougall (psychanalyste à laquelle elle se réfère parfois), donne lieu à des chapitres passionnants, écrits avec simplicité et dont il se dégage avant tout le souci de faire ressortir toute l’humanité de ces hommes et femmes qu’elle a accompagnés.

Fortement influencée par les travaux de Balint, mais aussi d’autres auteurs dont elle aborde l’œuvre dans une partie plus théorique (Freud, Jung, Winnicott, Klein…), Suzanne Képès se défend néanmoins de toute appartenance à une chapelle. Sa clinique s’en fait l’écho, avec des emprunts tant au comportementalisme qu’aux psychothérapies d’inspiration analytique. Loin de tout syncrétisme, il s’en dégage une surprenante harmonie, en tout cas une visible capacité d’adaptation aux besoins du patient, dans le respect de sa demande et de son désir. Il en découle que, même si cet ouvrage a été écrit pour être lu par tout profane de la psychologie, il possède un intérêt intrinsèque pour un thérapeute désireux de découvrir le parcours et les réflexions d’un auteur aux années d’expérience avérées, et d’en tirer nombre d’enseignements.

Cependant, si la clinique de Suzanne Képès est limpide, on reste plus dubitatif concernant le troisième temps de son essai : l’explicitation de ce qu’est pour elle la psychosomatique, et la pratique en relaxation qui en découle. En effet, on est parfois gêné par le terme «maladies psychosomatiques» utilisé à maintes reprises. On hésite à comprendre ce que l’auteur entend par ce terme. Simple vocable appris auprès de E. Weiss et O.S. English, dont le livre La Médecine psychosomatique a fait basculer la carrière de madame Kepès ? Sous-entendu que certaines maladies relèvent de la psychosomatique et d’autres pas ? Simple dénomination pour souligner l’importance du lien entre psyché et soma dans l’occurrence d’une pathologie ?

Assez curieusement, si la pratique clinique de Suzanne Képès est lumineuse et inspirée, l’abord théorique de tout ce qui touche à la psychosomatique est donc assez malaisé, voire d’un classicisme qui surprend. L’auteur penche pour la conception traditionnelle d’un défaut de symbolisation, avec un appel à la physiologie et à la neurologie pour expliquer les liens entre psyché et soma. Il en découle une compréhension théorique de la psychosomatique quelque peu causaliste, alors même que cette position est pour le moins battue en brèche par nombre d’auteurs actuels. Entre autres, Pascal-Henri Keller qui, avec son travail important autour de l’histoire de la psychosomatique, montre combien les théories causalistes ont été au final peu productives (voir notamment La Médecine psychosomatique en question, éditions Odile Jacob). Il propose, avec d’autres auteurs (comme Alain Ducousso-Lacaze), un questionnement autour de la notion d’analogie pour éclairer la question psychosomatique. Cette approche consiste à privilégier le «savoir profane» du patient au savoir du praticien, en privilégiant l’écoute de la dimension analogique du langage. On s’attendait donc à ce que Suzanne Képès se positionne dans cette perspective, puisqu’elle s’appuie amplement sur le discours de ses patients pour tenter de comprendre le lien entre soma et psyché. Il en découle que l’attachement de l’auteur dans une certaine compréhension causaliste de la psychosomatique emprisonne sa pensée, qui devient subitement moins fluide et ouverte.

Autre élément qui chagrine : si l’explicitation de la méthode de relaxation psychothérapeutique qui clôt l’ouvrage est d’un grand intérêt clinique, on est surpris par le «pouvoir» que madame Képès accorde aux mots, et qui va à l’encontre des théories analytiques auxquelles pourtant elle se référait avec à-propos dans un premier temps. Ce «pouvoir des mots» (pour reprendre son expression), oblitère la notion de «parole» au sens analytique du terme et surtout va à l’encontre de toute la théorie du transfert et de l’inconscient dont pourtant l’auteur affirme que sa révélation est la clef pour «être entier». Une bien curieuse façon de terminer cet essai.

Au final, on retient plus de l’ouvrage de Suzanne Képès tout ce qui va dans le sens de son titre : Le corps libéré, et l’on reste plus que circonspect pour tout ce qui se réfère au sous-titre «Psychosomatique de la sexualité». Autrement dit, cet essai est d’une grande qualité au niveau de la clinique, de son enseignement comme de sa pratique, et l’on souhaite oublier rapidement les circonvolutions théoriques de l’auteur. Elles ne constituent pas l’intérêt de ce livre, écrit avec une grande humanité de propos, dans un esprit bienveillant et éclairé.


Antoine Bioy
( Mis en ligne le 10/09/2003 )
Imprimer
 
 
SOMMAIRE  /   ARCHIVES  /  PLAN DU SITE  /  NOUS ÉCRIRE  /  
 
  Droits de reproduction et de diffusion réservés © Parutions 2004  
rencontre coquinesvpmonsite.com rencontre femme chat rencontre rencontre homme