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Littératureet Romans & Nouvelles  

Ma mère en plus jeune
de Hugues Royer
Le Cherche Midi 2006 /  15.00 €- 98.25  ffr. / 194 pages
ISBN : 2-7491-0520-X
FORMAT : 14x21 cm

Subtil et ironique

Des types comme Jérôme, vous en croisez tous les jours. Trentenaire, bien de sa personne, vie confortable, pas de soucis matériels, Jérôme est professeur dans un lycée de banlieue et partage sa vie avec Christine, une jeune femme qu’on imagine sortie tout droit de la série Desperate Housewifes. Et comme bien des types que vous croisez tous les jours, Jérôme est au bord de la crise de nerfs – le roman débute d’ailleurs par le meurtre fantasmé de Christine. Ses élèves sont nuls, l’administration du lycée pétrie de médiocrité et d’incompétence. Et il y a surtout Christine, qui s’épanouit quant à elle dans la débauche des tâches matérielles, arborant une sorte de mécanique de façade incroyablement agaçante... À l’image de la mère de Jérôme, dont l’ombre vampirique plane sur tout le roman et qui a dévoré son père. Tout au fond de Jérôme, un gouffre de violence et de relents affectifs familiaux mal digérés sommeille, prêt à tout dévaster, à l’instar de ces hommes ordinaires qu’on voit parfois subitement se transformer en meurtriers.

Ma mère en plus jeune raconte des tourments qui nous sont familiers. Une vie moderne où le quotidien n’est pas satisfaisant, mais où la dose de confort et de divagations matérielles finit par gangrener les révoltes et les questionnements. Révoltes et questionnements qui ne manquent pourtant jamais de revenir à la surface et font le pain béni des sorciers modernes, les psys. La narration, le plus souvent distante, est d’autant plus efficace qu’elle permet d’évoquer, par flashs d’émotion brutes, des troublants moments de violence. Voici le récit qui s’emballe, en faisant remonter à la surface des souvenirs fondateurs, des désirs inassouvis, des rancoeurs non exprimées.

Tout comme son roman précédent, Comme un seul homme, qui évoquait son service militaire, ce nouvel ouvrage de Hugues Royer est aussi un questionnement autour de la construction d’un homme, avec ses rites de passage – ici, la place des parents, de la filiation, de l’affranchissement du passé pour supporter une vie de couple... Un cheminement universel, retracé avec élégance, désenchantement et sagesse dans ce roman subtil qui évite l’écueil du nombrilisme.


Caroline Bee
( Mis en ligne le 13/02/2006 )
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