L'actualité du livre
Littératureet Littérature Américaine  

True Grit
de Charles Portis
Serpent à plumes 2011 /  20 €- 131  ffr. / 232 pages
ISBN : 978-2-268-07057-5
FORMAT : 11,9cm x 20,7cm

Traduction de John Doucette

Western biblique, polar social

A la fin de sa vie, une femme, Mattie Ross, raconte un épisode de sa jeunesse qui l’a marquée durablement. Lorsqu’elle avait 14 ans, son père a été assassiné par un de ses saisonniers, Tom Chaney, qui prit la fuite avec ses chevaux et ses pièces d’or. D’un caractère déterminé, Mattie entreprend de venger son père et malgré son jeune âge arrive à décider Rooster Cogburn, un marshall alcoolique et violent, à l’aider. Elle croise également un Texas ranger nommé «Laboeuf» et intéressé lui aussi par l’idée, la capture de Chaney devant rapporter une prime conséquente. Et le trio improbable de se lancer sur les traces de cet homme dangereux, dans l’Ouest américain du XIXe siècle. Le tout donne un roman policier inhabituel.

Nos trois compagnons connaissent des mésaventures quelquefois cocasses, souvent périlleuses, parfois dramatiques, toujours dures, au milieu d’un environnement inhospitalier, hivernal donc glacial, racontées par Mattie dont on ne découvre qu’à la fin qu’il s’agit d’une vieille femme. Et c’est l’un des premiers étonnements du livre : l’écriture de cette fillette et son raisonnement, qui ne correspondent pas à son âge - ce qui ne gêne en rien la lecture -, apportent au contraire un éclairage curieux sur les rapports adultes-adolescents dans cet univers difficile où la survie seule compte.

La deuxième curiosité, c’est le style à la fois satirique, réaliste et biblique de Charles Portis. Issu d’une famille de pasteur, il émaille son discours de sentences ou citations religieuses appropriées, il apporte des précisions intéressantes sur la vie dans ce contexte «western» si particulier, il ne recule devant aucun détail insoutenable pour décrire l’indescriptible et, en même temps, il manie l’humour et le détachement devant des situations visiblement désespérées. Sa grande habitude de journaliste écrivant des feuilletons (ses deux romans adaptés au cinéma ont été connus ainsi) sait nous accrocher et nous faire tourner les pages sans interruption.

Cette histoire d’enfance perdue, puisque Mattie passe en quelques semaines de ses 14 ans à un âge adulte définitivement imprégné d’aventures indélébiles, ne nous laisse pas indifférent. Il y a dans ce récit de fin de vie quelque chose de poignant, le sentiment d’avoir échappé à l’enfer, d’y avoir laissé l’essentiel de l’innocence et d’en avoir conservé une grande désillusion.

Un grand livre dont on comprend qu’il ait fait envie à plusieurs cinéastes.

Dany Venayre
( Mis en ligne le 04/03/2011 )
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