Beaux arts / Beaux livres
Beaux livres & Catalogues de Raphaël Colson et Gaël Régner
Les Moutons Electriques - Bibliothèque des miroirs 2010 / 29 €- 189.95 ffr. / 357 pages
ISBN : 978-2-915793-84-0
FORMAT : 21cm x 25,3cm
Le regard de deux passionnés sur un créateur passionnant
Le regard de deux passionnés sur un créateur passionnant. Hayao Miyazaki est l'un des grands maîtres de l'animation contemporaine, adulé dans son pays comme au-delà des frontières nippones où ses films sont aussi diffusés (par Buena Vista/Disney qui ne s'y est pas trompé), gourmandés, primés même (Le Voyage de Chihiro a reçu l'Ours d'or à Berlin en 2002). Une œuvre que le grand public français a découverte à la fin des années 1990, avec quelques premiers titres finalement diffusés sur grand écran, de façon plus ou moins confidentielle (Porco Rosso, Mon voisin Totoro) jusqu'au ''choc'' Princesse Mononoke (2000). Depuis, outre la diffusion des anciens films du maître (Le Château dans le ciel, Nausicaa de la vallée du vent, Kiki la petite sorcière), conjointement à ceux de Takahata, les derniers nés sortis de son imagination sont projetés en France dans la foulée du Japon. Dernier en date, Ponyo sur la falaise, l'an dernier.
Une œuvre certes enfantine mais dont la profondeur et la portée dépassent de loin l'horizon des 4/12 ans. Avec cette volumineuse étude, Raphaël Colson et Gaël Régner en proposent une ''cartographie''. Ils mettent ici à jour un ''schéma directeur de la fiction miyazakienne'', clé d'interprétation d'une œuvre rassemblant non seulement les longs métrages connus mais aussi des séries TV (Le Chat botté ; Conan fils du futur, etc.) et BD.
En commençant tout d'abord par le récit chronologique et détaillé de la production miyazakienne (pp.14-201), dans lequel, par un découpage par périodes (des "Années Tôei (1963/71)" au "Retour au merveilleux (2008-...)", en passant par les "Sociétés rétro-futures (1980-86)"), chaque film et série sont résumés en détails et contextualisés (évolutions, échos, influences). Loin d'être rébarbative, cette première partie permettra au fan du réalisateur de se replonger dans son œuvre et d'en découvrir aussi des aspects moins connus.
Vient alors la seconde partie de l'étude, avec la cartographie à proprement parler, récit global comprenant tous les autres et que les auteurs résument ainsi : "...nous avons toujours affaire à un couple et presque tous mènent, à titre individuel, un voyage initiatique les conduisant vers une contrée inconnue. Ce voyage leur dévoile un passage donnant accès à un espace fermé, au sein duquel se dissimule un jardin secret". Avec pour principal enjeux l'opposition entre Société, Civilisation et Nature, réalités conflictuelles : Miyazaki pointe sans cesse du doigt cette guerre entre nature et civilisation, pour dépasser l'opposition dans une synthèse que l'on pourrait dire panthéiste, "l'équilibre entre les promesses de la civilisation et le respect d'un environnement représenté par la nature".
Le schéma d'interprétation est convaincant, et ne surprendra d'ailleurs pas trop qui suit de près le travail de Miyazaki. Les auteurs prennent alors le temps de revisiter chaque œuvre à l'aune de cette grille de lecture, en n'évitant pas toujours des effets de répétition par rapport à la première partie de l'ouvrage, mais toujours dans un effort de nuances (notamment sur l'écologisme et la misanthropie miyazakiens).
L'étude, sérieuse et concluante, souffre cependant de deux problèmes de forme. Le premier concerne les illustration qui, si elles sont nombreuses, riches et variées, passent hélas quasiment toutes par le Noir & Blanc (à part les quatre pages liminaires). Plus grave : l'analyse est handicapée par un souci d'écriture, tout à fait perfectible, souvent maladroit, parfois redondant.
Mathieu Gazzola
( Mis en ligne le 22/11/2010 )
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